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vendredi 24 mars 2023

Les rats, nos amis, nos héros

Rat démineur recevant une récompense

Le rat est un animal qui suscite la peur et le dégoût, sans doute parce qu’il est connu pour vivre et proliférer dans les égouts et autres lieux peu ragoûtants, également parce qu’il est associé à la propagation de la peste et d’autres maladies. Ce sont toutefois des animaux très intelligents - comme le sont les corneilles qui ont, elles aussi, mauvaise presse - capables d’apprendre à exécuter toutes sortes de tâches. 


C’est ainsi que Bart Weetjens a eu l’idée de former des cricétomes des savanes (Gambian pouched rat ou giant pouched rats en anglais) pour leur apprendre à déceler des odeurs qui échappent aux narines humaines, notamment celles de la tuberculose et des mines anti-personnel (TNT). Il a fondé APOPO, une ONG qui se consacre au déminage et au dépistage de la tuberculose, grâce au flair de ces rats géants, les HeroRATS - qui n’appartiennent toutefois pas à la famille des rattus. Les cricétomes étant suffisamment légers, ils ne déclenchent pas d’explosion, mais savent indiquer la présence d’une mine-antipersonnel. APOPO est présente dans plusieurs pays, notamment au Cambodge, en Angola, au Zimbabwe et au Mozambique, ce dernier pays ayant été entièrement nettoyé des mines meurtrières disséminées partout pendant la guerre civile. En outre, APOPO forme des chiens qui sont capables dinspecter des terrains préalablement déminés par les rats, afin de confirmer quils sont dorénavant sûrs. Les HeroDOGS travaillent au Cambodge, en Angola, au Sud Soudan, en Turquie et en Azerbaïdjan. 


Les HeroRATS sont également capables de dépister des cas de tuberculose, une des maladies infectieuses les plus mortelles (1,5 millions de morts en 2020, année d’apparition de la Covid-19, source OMS). Nous avons tendance à penser que cette maladie n’existe plus, mais elle fait des ravages dans les pays pauvres. APOPO collabore avec les gouvernements de Tanzanie, du Mozambique et d’Ethiopie. Les rats parviennent à identifier un grand nombre d’échantillons très rapidement pour un coût qui revient à 1€/pièce. 


Les rats géants sont aussi capables de retrouver des corps enfouis sous des décombres, non seulement grâce à leur odorat, mais parce qu’ils parviennent à se faufiler partout et qu’ils sont très curieux. Ils sont équipés de mini-baudriers munis de caméras et de micros : les équipes de sauveteurs peuvent ainsi communiquer avec les personnes retrouvées.


Les possibilités étant infinies, les cricétomes des savanes sont capables de lutter contre la contrebande d’espèces menacées, notamment les pangolins, ou d’essences d’arbres rares et précieux. Cela prend neuf mois pour apprendre à un HeroRAT à reconnaître une odeur - que ce soit celle du TNT, du pangolin ou de la tuberculose - et ils sont formés avec la technique du clicker utilisée pour éduquer les chiens ou n’importe quel autre animal : chaque fois que l’individu démontre le comportement attendu, il entend un déclic et reçoit une récompense, en l’occurence de la banane ou tout autre friandise dont il se régalera. 




Les éléphants sont eux aussi dotés d’un flair exceptionnel, ils ont plus du double de gènes associés à l’olfaction que les chiens. Il a été observé qu’ils évitaient les champs de mines en Angola. On ne sait trop comment, mais ils ont appris à associer l’odeur du TNT avec la mort de leurs congénères ayant explosé. Les éléphants sont évidemment bien trop lourds pour travailler comme le font les cricétomes, mais ils indiquent la présence de TNT à distance : des échantillons sont prélevés par des drones. Par ailleurs, des chercheurs tentent de comprendre leur flair, afin de développer des outils de détection. Les pachydermes sont probablement encore plus efficaces que les chiens, ils ont une mémoire d’éléphant - haha - et vivent très longtemps. 

Eléphant démineur

APOPO est l’acronyme de « Anti-Persoonsmijnen Ontmijnende Product Ontwikkeling » (en français : Développement d'un produit de détection anti-mines terrestres). Cette ONG a été enregistrée comme organisation à but non lucratif en Belgique en 1998, puis elle a reçu divers soutiens et titres de reconnaissance. En 2018, elle s’est associée à l’Université de Manchester, afin de poursuivre la recherche autour de la détection de maladies en se fondant sur l’odeur. Le centre de recherche et de formation d’APOPO se trouve en Tanzanie. 


En 2015, une Fondation APOPO a ouvert ses portes à Genève, afin de profiter des synergies à tirer avec le Centre international de déminage humanitaire (GICHD) et les centres de recherche sur la tuberculose (OMS et FIND, Foundation for Innovative New Diagnostics) basés dans cette ville. Cette Fondation a pu voir le jour grâce aux contacts noués par le biais de Ashoka, un « accélérateur mondial pour promouvoir des initiatives sociales ». 

APOPO fête actuellement ses 25 ans d’existence, le même âge que le traité d’Ottawa pour l’élimination des mines antipersonnel (1997). A l’heure actuelle, il y a encore 100 millions de mines dans 60 pays. Cela prendra encore du temps - surtout que des mines continuent d’être dispersées, notamment en Ukraine - mais on pourra sans doute compter sur ces adorables rats de Gambie et leur engagement inlassable pour les retrouver. 


www.apopo.org
https://www.youtube.com/c/apopovideos 
https://www.bbc.co.uk/newsround/63388395
https://theconversation.com/how-african-elephants-amazing-sense-of-smell-could-save-lives-85626 

  

jeudi 2 janvier 2014

Un ferry pour la Corse



Il n’est pas simple de partir en vacances quand on a un animal de compagnie. Il faut trouver quelqu’un qui puisse et qui veuille bien vous le garder - on préfère éviter les chenils et les chatteries - ou alors, il faut l’emmener avec soi. C’est ainsi que nous avons trouvé la solution idéale pour trouver un peu de soleil en décembre, sans devoir aller trop loin: la Corse, en voiture, donc en ferry.

Il existe différentes compagnies qui font la traversée, au départ de Toulon, Nice ou Livourne et accostant à Bastia, Ajaccio, voire la Sardaigne. La SNCM accepte les chiens, mais les met en chenil, c-à-d dans des cages et nous ne leur faisons pas trop confiance pour que notre petite chérie soit bien traitée. N’ayant pas encore découvert la compagnie La Méridionale, nous avons opté pour Corsica Ferries, qui nous permet de garder notre chienne avec nous, dans une cabine spécialement aménagée, avec un sol en linoléum plutôt que de la moquette. La SNCM étant une compagnie française, elle a la réputation de se mettre fréquemment en grève, précisément à l’occasion des transhumances de vacances, raison de plus pour opter pour une autre compagnie.

Ayant atteint un âge où on apprécie d’avoir un peu de confort, j’ai réservé l’option Premium Boarding pour 30€, pensant que cela nous permettrait de bénéficier de certains avantages. Le bateau partant à 23:55, j’ai cherché à savoir à partir de quelle heure on pouvait embarquer, pensant que nous aurions ainsi le temps de nous installer et peut-être d’aller boire un verre, soit à terre soit à bord du ferry. Il a été relativement difficile de trouver une réponse autre que "Vous devez être au port au plus tard une heure avant le départ". Oui, mais: "au plus tôt"? Eh bien, une heure avant le départ, étant donné que le ferry de Toulon vient de Nice, uniquement pour embarquer d’autres passagers et véhicules. Mais, pas de soucis, puisque nous avons l’option Premium!


Le site de Corsica Ferries ne donnant pas d’autre adresse que «Port de Commerce», que le GPS ne reconnaît pas*), nous nous sommes rendus au débarcadère bien à temps pour avoir de la marge. Nous nous sommes mis dans la file Premium et on nous a prié de revenir à 23:15 pour l’embarquement. Rien n’a bougé avant 23:40 environ**), après quoi, toutes les voitures (environ 150) ont embarqué avant nous. En effet, le Premium Boarding signifie que nous sommes les premiers à débarquer, donc forcément les derniers à embarquer, logique. Le passager non-conducteur peut toutefois monter à bord tout de suite. Il a ensuite fallu manoeuvrer - avec très peu d’espace et très au bord de l’eau - pour embarquer en montée et en marche arrière. Nous sommes arrivés à l’étage des cabines (aucune indication d’étage dans l’ascenseur) vers 00:30, en tant que derniers passagers. Réveil par interphone - ding-dong! - à 06:00, les cabines doivent être libérées pour 06:30. Heure théorique d’arrivée 07:00, heure d’arrivée réelle 07:30. Une heure d’attente dans l’escalier, devant des portes fermées, qui ont ouvert à 07:25. Nous avons dû nous précipiter - en tant que passagers Premium - pour dégager la voie, puisque nous étions devant tous les poids-lourds qui, impatients de sortir, avaient déjà tous allumés leur moteur. Quelle joie, après une nuit de 5h, avec une climatisation faisant un bruit infernal et impossible à éteindre, que de devoir se faufiler entre d’énormes camions en étouffant parmi les gaz d’échappement!

Il est possible de voyager assis dans un fauteuil ou de réserver une couchette dans une cabine à plusieurs, un peu comme dans un train de nuit. Mais il vaut mieux alors ne pas choisir l’option Premium, car vous allez réveiller tout le monde quand vous arriverez, 30 à 40 minutes après le départ.

Je redoutais un peu le voyage du retour et m’étais préparée à passer une très mauvaise nuit. Mais on aurait dit que c’était une autre compagnie, d’ailleurs tout le personnel parlait italien et à peine le français. Le départ étant à 20:00, il était possible de monter à bord, tranquillement, chacun son tour, dès 18:00, ce que nous avons fait. Pour notre véhicule Premium Boarding, on nous a indiqué une file et j’ai fait la manoeuvre pour me mettre dans l’autre sens une fois à bord, dans une cale bien éclairée et au sol horizontal. De là, nous avons pu aller nous installer en cabine, faire un petit tour et même aller manger, ce qui n’était évidemment pas possible avec un départ autour de minuit. La nuit a été tranquille, pas de clim infernale et les passagers pouvaient profiter de leur cabine jusqu’à l’arrivée à quai. Une annonce par interphone a invité les conducteurs des véhicules du premier étage à évacuer à se rendre au garage. Et comme nous avions l’option Premium, nous sommes en effet sortis les premiers, ce qui était bien agréable.


Les toilettes pour chien se trouvent au 7ème étage, sur le pont supérieur. Il s’agit d’un petit carré de gravier de 1 x 2 mètres. Notre chienne n’y a évidemment rien compris et a su, fort heureusement, se comporter en demoiselle jusqu’au débarquement. Le pont supérieur lui a toutefois permis de faire des rencontres canines, car il y avait pas mal de chiens à bord. Nous lui avions acheté une muselière, car le site internet disait que c’était obligatoire. Pas un seul chien n’en portait et personne ne nous l’a demandé. On ne nous a pas demandé son carnet de vaccination non plus. 

Le ferry n’était pas particulièrement bondé, étant donné surtout la grève de la SNCM. Il n’y a apparemment pas eu de report de passagers. Visiblement, ce n’est pas l’amour fou entre les différentes compagnies concurrentes, surtout si certaines ne font pas la grève dès qu’une bonne occasion s’en présente. La SNCM est au bord de la faillite, s’est vu promettre une aide de l’Etat (30 millions € pour une entreprise privée), fait grève et intente des procès contre Corsica Ferries pour concurrence déloyale. Les syndicats exigent que les ferries battent pavillon français et engagent du personnel français à bord, Mais est-ce bien légal, au sein de l’Union européenne, d’appliquer ce genre de mesures protectionniste? Que le meilleur gagne, ma foi...

En synthèse:
  • Si vous en avez les moyens et que vous n’emmenez pas votre animal de compagnie, prenez l’avion. Evitez Air France, qui se mettra en grève. Mais sachez que les locations de voiture coûtent cher. Ils auraient tort de s’en priver.
  • Evitez les départs autour de minuit.
  • Evitez la SNCM, qui est un nid de communistes, dixit un passager. Idem pour la Méridionale.
  • Evitez le port de Marseille, qui est aux mains de la CGT, qui bloque toujours tout. Ce sont des bandits, dixit le même passager.
  • Avant de prendre l’option Premium Boarding, renseignez-vous pour savoir si cela signifie que vous embarquerez en dernier. Apparemment, cela dépend du port, du ferry, de l’heure du départ et de l’âge du capitaine. Au retour, Ajaccio-Toulon, c’était un bon choix.
  • Notez l’adresse du quai dans le port si vous utilisez un GPS, qui est fort utile dans les villes pleines de sens interdits et où le port n’est indiqué qu’un carrefour sur deux.
  • Préparez un petit baluchon pour la nuit, car les garages sont fermés pendant la traversée. Ne rien laisser dans la voiture qui risque de souffrir de la chaleur (un animal de compagnie, par exemple).

Enfin, évitez sans doute Ajaccio comme destination en Corse, surtout en décembre. Il a certes fait beau et nous y avons trouvé le soleil et des températures douces, mais la région n’est pas particulièrement intéressante ni spectaculaire.


PS: Si nous sommes partis de Nice, c'est parce que les cabines pour chien au départ de Toulon affichaient complet. Toutefois, nous sommes montés à Nice (100km de plus à faire) dans le ferry qui venait de Toulon, ce qui signifie que notre cabine a fait le même trajet, vide. L'organisation n'est pas exactement efficace ni rationnelle.... J'ai pourtant fait une demande et expliqué que ça nous arrangerait mieux de partir de Toulon, mais il n'y avait rien à faire: les départs de Toulon étaient complets!


* * * * *

*) l’adresse du débarcadère pour Ajaccio est quai Infernet. Une fois sur place, rien n’indique que c’est le lieu de l’embarquement. Ou alors, il faisait trop sombre et nous n’avons rien vu. Nous sommes entrés à l’autre bout et avons fait le tour du bassin portuaire.

**) le ferry venait de Toulon et faisait une brève halte à Nice pour embarquer d’autres passagers. Voilà pourquoi il n’était pas possible de monter à bord plus tôt. Renseignement à prendre par avance.


vendredi 27 juillet 2012

Le chien, adjuvant social

Photo J. Piroué
Depuis que mon ami a adopté un chienne à la SGPA, j’apprends plein de choses concernant les canidés, leur éducation, leur langage corporel, le parcours du combattant pour obtenir la médaille, j’ai même acquis le réflexe du sac-à-crotte dans toutes les poches (qui dépanne bien souvent, un peu comme les sachets dits hygiéniques, pour y mettre des trucs et des machins). J’ai aussi découvert ce que cela signifie d’être l’objet d’un amour aussi irrationnel qu’immodéré, d’être le centre de l’univers, le soleil, la lune et tout l’univers pour un petit être poilu qui parvient à s’extasier devant un lancer de bâton, un crouton de pain sec trouvé parterre ou un écureuil qui disparaît le long d’un tronc. 
Au fil de mes promenades canines, je fais toujours des rencontres. Je parle à des gens à qui je n’aurais jamais adressé la parole si je n’avais pas été accompagnée de ma petite copine à quatre pattes. Je retrouve souvent la même clique hétéroclite au Bois de la Bâtie, un grand parc qui a été légué à la ville de Genève à la condition expresse que les chiens puissent y batifoler en liberté. Un groupe de dames retraitées, des jeunes, des vieux, des gens bizarres ou pas, tous accompagnés de leur toutou d’amour. Nous observons attendris les jeux et les courses entre nos petits protégés et, l’air de rien, la conversation s’engage entre nous. Des bavardages inoffensifs, de type Café du Commerce, mais nous nous connaissons désormais et nous savons que nous retrouvons le petit groupe des habitués vers 16h30, tous les jours au même endroit. Sur le chemin du retour, j’ai croisé plusieurs fois un monsieur espagnol, de Galice, qui a des chiens de chasse au pays qui sont imbattables pour traquer le sanglier. Il m’a aussi raconté qu’il savait très bien imiter Luis Mariano, même qu’il s’est mis à chanter pour moi. Un autre, qui avait un chien d’eau, race que je ne connaissais pas encore, m’a raconté qu’il partait souvent au Sénégal parce qu’il travaille dans la pêche. Ça ne serait jamais arrivé si j’étais passée seule devant eux.

Au restaurant, la chienne provoque très souvent des contacts avec les tables voisines et c’est rarement pour cause de plaintes ou de craintes. Récemment en voyage, un couple de retraités à la table d’à-côté, au petit-déjeuner, nous a raconté qu’ils ont un berger allemand, mais qu’ils ne l’ont pas emmené avec eux. Nous nous trouvions à Descartes (Indre et Loire) et ils avaient fait le voyage de Nantes, car leurs enfants leur avaient offert des billets pour le spectacle des Bodins, qui raconte la vie d’autrefois à la ferme. C’était la première fois qu’ils partaient en vacances!! De Nantes à Descartes!! Ils nous ont aussi raconté qu’ils avaient eu un accident de voiture et qu’ils y ont perdu leur 4x4 qui n’avait que 34.000km!! Et patati et patata. Rien de tout cela ne serait arrivé si nous n’avions pas eu la chienne à nos pieds sous la table. Dans la même localité, une dame âgée, admirant ma choupette, se met à me raconter qu’elle avait aussi eu un chien autrefois, qu’il avait eu une néphrite, qu’il avait fallu l’opérer, mais que la pauvre bête n’avait pas supporté et qu’il avait fallu la piquer. «C’est un chagrin....! Mais un chagrin....!!!! Je n’en veux plus! C’est trop dur! Et mon mari qui est mort d’un cancer! Non, je ne veux plus d’animal, c’est trop de chagrin!» J’avais l’impression que la perte de son chien avait été un coup plus dur que le décès de son mari. Ou encore cette dame russe qui me sourit d'un air complice et attendri:
- Ya poutine!
- Vous?! Poutine?!
- Da! Ya poutine! me dit-elle en se penchant légèrement sur le côté, la main à l'horizontale à environ 70cm du sol.
- Oh! You also have a dog!
Je vais lui présenter l'objet de son admiration et elle sussurre:
- Bellissima!
Nous échangeons encore quelques borborygmes multilingues, après quoi elle me dit Au revoir! et je lui réponds Dasvidania! Je ne sais pas encore si chien se dit poutine en russe ou si elle a appelé son chien comme ça.


Par ailleurs, on entame quasi-systématiquement des conversations de nature sexuelle avec de parfaits inconnus: «C’est un mâle? Non, c’est une femelle. Alors ça va. Le mien, j’ai dû le faire castrer, depuis, il a pris du poids. Elle a ses chaleurs, elle est portante. Ah, la nôtre, elle est stérilisée, alors il n’y a aucun problème». Les chiens font connaissance en se reniflant le derrière, le devant, les côtés, les mâles font parfois mine de vouloir grimper et c’est reparti pour les considérations génitales. 

Les enfants sont toujours fascinés par les animaux. En général, ils regardent de loin, ils ont envie, mais n’osent pas. Les parents leur apprennent qu’il faut demander la permission, puis ils s’approchent très prudemment et touchent le dos de la bête du bout des doigts, n’en revenant pas de leur audace. En France, les chiens sont rigoureusement enfermés derrière des barrières ou tenus en laisse très serré. Lorsque nous croisons d’autres maîtres, ils tirent violemment sur le cou de leur animal pour éviter tout contact avec un congénère, ce qui ne cesse de nous surprendre. Ce n’est alors pas étonnant si les chiens sont méchants, aboient et mordent, nous en ferions autant si on nous refusait tout contact avec autrui.

Photo J. Piroué
Notre chienne est très sociable et très curieuse. Elle se précipite dès qu’elle voit un chat mais, une fois qu’elle est nez à nez avec une de ces drôles de bêtes qui fait le dos rond et la fusille du regard avec mépris, elle ne sait plus que faire et s’en va, toute penaude. Elle aimerait beaucoup courir après les écureuils aussi, mais c’est bien plus difficile. Au zoo de Beauval, elle a été absolument fascinée par les manchots et les ouistitis, elle aurait adoré pouvoir jouer avec eux. En revanche, elle était terrorisée par les gros tigres endormis, qui ressemblaient pourtant à de gros troncs. Elle n’en n’avait jamais vu et ne pouvait pas savoir ce que c’était, mais quelque chose comme une odeur de fauve devait se dégager de ces grosses bêtes, quelque chose qui annonçait un danger terrible.
Vivre et a fortiori voyager avec un chien est certes une contrainte, mais cela permet aussi de voir les choses sous un angle nouveau. Moi qui ai souvent voyagé seule, je constate que je suis perçue de façon très différente par les gens que je croise. Une femme seule est toujours considérée comme quelque chose d’un peu anormal - dans la salle à manger d’un hôtel, un enfant qui n’arrêtait pas de me dévisager a fini par demander à ses parents pourquoi la dame elle était toute seule - voire d’un peu menaçant - les épouses surveillent leur mari d’un oeil vigilant, on ne sait jamais. Accompagnée d’un chien, je redeviens quelque chose de normal, je corresponds à un moule connu et ça redevient plus rassurant pour tout le monde. Quand je serai vieille et moche, je pourrai sans doute circuler dans le monde sans faire peur aux gens. Sacrée consolation....

dimanche 22 avril 2012

Ton chien une médaille aura...


... et à la sueur de ton front, tu l’obtiendras.
Voilà la devise de tout détenteur de chien à Genève. Etant devenue, bien malgré moi, la semi-maman d’une adorable chienne, j’ai tout loisir d’observer ce que cela représente d’avoir un animal de compagnie. C’est beaucoup d’amour, de plaisir et de moments amusants, mais c’est aussi beaucoup de contraintes, de soucis, de frais et d’emm... administratifs.

Commençons par le commencement. Adopter un chien à la SGPA  coûte 250 CHF, ce qui couvre les frais vétérinaires, les vaccins, la stérilisation et la puce ANIS , qui permettra de vous retrouver si vous étiez tenté d’abandonner votre chien sur une aire d’autoroute. Il faudra ensuite vous équiper d’une ou de plusieurs laisses, ainsi que d’un modèle pour la voiture, qui s’accroche comme une ceinture de sécurité; une ou de plusieurs gamelles, des jouets, une couverture ou un panier; de la nourriture et des friandises, bien évidemment. Si vous pensez qu’il vous suffit maintenant de jouer avec votre toutou, vous vous trompez lourdement! Si vous prenez un chien adulte, il aura certainement déjà appris à être propre et aura aussi acquis certains comportements corrects, mais il reste encore à créer le lien entre vous et la bête, pour qu’elle revienne quand on l’appelle, par exemple.
Viennent ensuite les démarches administratives. Les détenteurs de chiens doivent s’acquitter d’un impôt, ce qui est bien normal. Mais il ne suffit pas de payer et basta, ce serait trop simple. Tout chien et tout maître doivent suivre quatre cours d’éducation canine obligatoires, en vue d’obtenir l’attestation correspondante, qu’il vous faudra ensuite présenter pour obtenir la médaille qui prouvera que vous êtes en règle. Si votre chien pèse plus de 25 kg et/ou fait plus de 56 cm au garrot, vous devrez passer un TMC, le test de maîtrise et de comportement et passer à la caisse en conséquence. Ne reste plus alors qu’à trouver un éducateur canin, avec l’aide de google. Entre ceux qui ne répondent ni au téléphone ni aux e-mails, entre ceux qui vous disent: «Ah? Parce que vous voudriez suivre des cours?», ceux qui reçoivent leurs élèves les jours ouvrables pendant les heures de bureau.... ce n’est pas si simple que ça en a l’air. Nous avons fini par trouver une école pour chiens, les dimanche matins à 10h, en rase campagne, il faut donc impérativement avoir une voiture.



Nous avons réussi à faire les quatre cours dans le délai imparti, en dépit de plusieurs dimanches d’un froid polaire ou de pluies diluviennes. C’était très sympathique d’être en forêt, avec toute une ribambelle de chiens de toutes les tailles et de toutes les couleurs. L’ambiance était celle d’une cour d’école: les toutous se jaugent les uns les autres, il y a les petits et les grands, les timides, les fanfarons, les grandes gueules, les désobéissants, les premiers de classe et notre petite chérie, que nous couvions des yeux, en espérant qu’elle sera sage et qu’elle ne nous couvrira pas de honte. Le cours est ponctué de plusieurs récrés, au cours desquelles tout ce petit monde peut courir et jouer ensemble. On ne peut pas vraiment dire que nous ayions appris grand chose, étant donné qu’on nous disait de faire tel ou tel exercice et si notre chienne n’y arrivait pas, le moniteur nous disait: «il faudrait qu’elle reste à sa place» ou «il faudrait qu’elle revienne quand vous l’appelez». Certes. Notre choupette est relativement obéissante*), mais comme ça, tôt le matin, quand on n’a pas encore eu le temps de lui donner de grande balade d’une heure pour la défouler et qu’elle est entourée de plein de nouveaux copains, elle était trop distraite et excitée pour faire attention à nous. Toujours est-il que nous avons rempli notre devoir, 4 x 25 CHF + 30 CHF pour l’attestation, ne restait plus que le reste du chemin à parcourir, à savoir trouver la police municipale.



A nouveau, c’est google qui a volé à ma rescousse, car personne n’était capable de me dire où elle se trouvait. L’éducatrice canine habitant du côté français n’en n’avait pas la moindre idée, le réceptionniste à la police cantonale non plus. Ayant finalement trouvé leur site internet, j’y ai aussi trouvé la liste des documents à rassembler:
  1. la confirmation de l'enregistrement du chien à la banque de données ANIS (puce électronique);
  2. l'attestation d'assurance responsabilité civile spécifique pour "détenteur de chien";
  3. le certificat de vaccination, avec vaccin contre la rage obligatoire avec une protection vaccinale valide. ... ;
  4. l'attestation de suivi du cours théorique ou le justificatif de sa dispense délivré par le service de la consommation et des affaires vétérinaires (SCAV);
  5. l'attestation de suivi du cours pratique ou le justificatif de sa dispense fourni par le SCAV;
  6. la pièce d'identité du propriétaire.
A noter que si vous avez été détenteur d’un chien avant le 1er septembre 2008 et que vous arrivez à le prouver, vous serez dispensé de suivre le cours théorique. La médaille coûte 10 CHF et l’impôt proprement dit 107 CHF pour le premier chien (147,- pour le deuxième et 207,- dès le troisième). Les années suivantes, le bordereau pour l’impôt devrait arriver automatiquement par la poste, il ne sera plus nécessaire d’aller transporter tous ces documents au guichet de la police municipale.
Il ne reste plus qu’à penser à lui donner du vermifuge et de l’anti-tiques et à renouveler les vaccins le moment venu. Avoir un chien demande beaucoup de patience et de tolérance, il faut organiser sa vie autour de son compagnon, en sachant qu’il faut lui donner au moins quatre sorties par jour, non seulement pour lui permettre de faire ses commissions, la petite et la grande (penser à toujours avoir plusieurs sacs à crotte sur soi, ça peut servir), mais aussi pour sa santé mentale et son bien-être. Laisser un chien tout seul toute la journée dans un appartement est cruel et égoïste. Les chats supportent cela bien mieux, surtout s’ils sont à deux (ou trois).
En échange de tout ce travail, de tous ces frais et de tous ces efforts, on a un ami fidèle et sincère - un chien est incapable de mentir ou d’être hypocrite - et tout plein de léchouilles! Obsédés de l’hygiène s’abstenir...

Moi, tant qu'on me donne des bananes...
*) grâce à une série de cours d'éducation au clicker, l'objet d'un prochain texte


Voir aussi: Parlez-vous chien?

Loi genevoise sur les chiens

vendredi 29 avril 2011

Parlez-vous chien?


Vous rappelez-vous le bon Dr Doolittle, l’homme qui savait parler aux animaux ? C’est sans doute un des fantasmes éternels de l’homme que de parvenir à lire dans les pensées des bêtes qui lui sont proches. Savoir ce que mijote un grizzli ou un aigle nous intéresse certainement moins que de comprendre Médor ou Minet, dont la pensée est toutefois assez aisément accessibles. Pas exactement du Kierkegaard. J’ai connu des chiens qui comprenaient immédiatement des mots tels que promener, chocolat ou encore chat ; leur vocabulaire s’étend bien sûr aussi à Couché ! Platz ! ou Sit ! Les chats, quant à eux, comprennent peut-être l’humain mais n’en laissent rien paraître. Ah ? Je n’ai pas le droit de me faire les griffes sur le canapé ? Tiens… c’est nouveau::prend un air d’ennui blasé :: En revanche, ils savent très bien faire passer leurs revendications: miauler bruyamment devant la porte, fût-ce au milieu de la nuit, est un message que même le dernier des idiots comprendra sans peine.


Les chevaux saisissent très bien l’intonation de la voix humaine. J’ai vu des Japonais parler leur langue à leur monture pendant la leçon d’équitation et elle les comprenait sans doute mieux que moi. Il arrivait aussi que mon cheval se mette à galoper avant que je ne lui en donne l’ordre, uniquement parce que le professeur annonçait le changement d’allure à la lettre H1). Les chevaux savent aussi compter 60x60 : ils savent parfaitement quand la leçon touche à sa fin et à partir de ce moment, ils deviennent sourds comme des pots et n'entendent même plus le japonais.

Un ami vient d’adopter une jeune chienne à la SPA. Elle est très bien élevée, ne mendie pas à table, ne tire pas sur la laisse. Mais que peut-il bien se passer dans sa tête et comment diable lui expliquer ce qui se passe ? Dans un premier temps, elle a dû penser qu’on l’emmenait promener ou qu’on allait simplement quelque part. Mais comme la même personne semblait être à ses côtés de façon plutôt durable, elle a dû commencer à faire 1+1 et se dire que ça ne se passait pas comme d’habitude. Une première tentative de la laisser, ne serait-ce que 20 minutes à quelqu’un a été un véritable fiasco : elle a refusé d’avancer du moindre centimètre, tirant désespérément dans la direction de celui dont elle commençait à subodorer qu’il était son nouveau maître. Comment lui dire que papa va revenir ? Et ensuite, comment lui apprendre qu’il ne faut pas aboyer chaque fois qu’un inconnu passe près d’elle ? A la SPA, son univers était minuscule et voilà qu’elle découvre les vitrines, le bus, plein d’autres chiens, des odeurs et des couleurs entièrement nouvelles. Elle a bien essayé le regard implorant, façon S’il vous plaît, Madame ! quand nous étions à table et elle donne souvent la papatte, l’air de dire : Ecoute, j’ai quelque chose à te raconter, mais le dialogue humano-canin reste à un niveau très rudimentaire.


Les chiens ont des maîtres, les chats ont des serviteurs. L’homme leur apporte leur nourriture quotidienne. Le chien pense : cet homme trouve ma nourriture, il doit être dieu. Le chat pense : cet homme m’apporte de la nourriture, je dois être un dieu. Que les gens choisissent plutôt un chien ou plutôt un chat comme animal de compagnie en dit long sur leur personnalité. Les chats viennent souvent en multi-pack : soit on en a un, soit on en a douze ou quarante-sept. Mais que ce soit un chien, un (des) chat(s), des gerbilles ou des canaris, les animaux nous réchauffent le cœur et nous apportent quelque chose que les humains ne peuvent tout simplement pas offrir, à cause des convenances, à cause du qu’est-ce-qu’il-va-penser-si-je fais-ça, à cause de notre timidité et de nos inhibitions. Les animaux nous aiment sans complications, sans poser de questions, sans chantage émotionnel. Ils connaissent toutefois la jalousie et il n’est pas toujours facile de se refaire une vie de couple une fois qu’on a bâti une relation avec toutou ou minou.

Avoir un compagnon, qu’il ait deux ou quatre pattes, entraîne certaines contraintes mais apporte aussi beaucoup de joie et de plaisir. Etre seul, c’est être libre, mais c’est aussi être seul. Ma foi, on ne peut pas tout avoir.

2)

_________________________________________________
1)Des lettres au bord du manège servent de repères pour les figures à faire ou pour les changements de direction
2)
www.icanhascheezburger.com Le succès de ce site réside certainement dans le fait qu’il joue sur l’idée d’un dialogue avec les chats.
http://www.sgpa.ch/

et voici un minet qui sait très bien se faire comprendre!
http://www.youtube.com/watch?v=JhlfT-x6Ys0&feature=player_embedded