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mardi 22 juin 2010

La fierté d’une petite nation



Etant donné qu’il est impossible d’ignorer la Coupe du Monde de football qui est en train de se dérouler en Afrique du Sud, autant suivre les événements dont tout le monde parle. Ce qui me frappe le plus, c’est le parallélisme entre les destinées des équipes de France et de Suisse. Parallélisme est bien le mot juste, puisqu’il s’agit de deux lignes droites condamnées à ne jamais se rencontrer – c’est la fille de mon père qui vous parle, voir le sujet précédent.

La France est omniprésente à Genève, elle nous entoure de partout. De nombreux Français viennent travailler à Genève et les Genevois sont tout aussi nombreux à aller faire leurs courses en France voisine. Tel un vieux couple, les deux nations s’aiment et se détestent, qu’il s’agisse des frontaliers qui viennent travailler en Suisse ou du prix de l’immobilier qui grimpe en France, qu’il s’agisse du CEVA ou du secret bancaire. Genève est indéniablement le plus français des cantons de Suisse. Mais revenons au football…

Alors que l’équipe de France semble avoir perdu avant même que le championnat n’ait commencé, les Suisses sont sur un petit nuage depuis qu’ils ont marqué un but contre l’Espagne, championne d’Europe, qui a sans doute péché par excès de confiance. Les commentateurs radio étaient survoltés, on aurait dit qu’un Suisse venait de marcher sur la lune. Le pays tout entier exulte. J’ai même remarqué une voiture dont les rétroviseurs étaient décorés de petites moufles aux couleurs du drapeau suisse.

Pendant ce temps-là, sur une ligne parallèle, les Bleus nous font la Ferme des Célébrités en direct live. Dans les épisodes précédents, la main de Thierry Henry – les Irlandais doivent se délecter de Schadenfreude (1) – et les mauvaises fréquentations de Ribéry, aussi mineures que vénales; les insultes de vestiaire d’Anelka, le boycott de l’entraînement et la démission vindicative du président de l’équipe ; le sélectionneur Domenech qui qualifie leur comportement d'aberration, d'imbécillité et de stupidité sans nom. Ambiance. Dire qu’on comptait sur eux pour faire passer la réforme du régime des retraites en douceur…

Les Suisses ont perdu 1-0 contre le Chili, mais ils trouvent malgré tout formidable d’être là. Même s’ils ne parviennent pas jusqu’aux huitièmes de finale, ils auront participé, ils auront au moins marqué un but, ils sont contents. Alors que l’équipe de France semble avoir oublié pourquoi ils sont venus loger dans un hôtel dont leurs nuitées accumulées équivalent au PIB du Botswana.

L’Histoire marque indéniablement l’égo des nations. En Irlande, j’ai été frappée par des autocollants sur des voitures disant God made the Irish. Ce qui est certainement vrai, mais pourrait-on imaginer la même chose sur une voiture immatriculée en Allemagne ? Ou encore des t-shirts disant Kiss me, I’m Irish. Imaginez la même chose sur un Français…

Un célèbre D-Jay a sorti un disque intitulé F*** me, I’m famous. Voilà peut-être une idée de t-shirt pour l’équipe de France !

P.S .: à l’heure où nous mettons sous presse, l’Afrique du Sud et la France sont toutes deux éliminées de la Coupe du Monde. Les Sud-africains font la fête malgré tout. La défaite est moins lourde à porter pour les petites nations (au sens footballistique).
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(1) pour les nuls qui n’auraient pas suivi : Thierry Henry a commis une faute de main qui a permis à la France de se qualifier pour la présente Coupe du Monde, écartant l’Irlande.
(1) Pour les nuls bis, Schadenfreude est un mot dont on dit qu’il n’existe qu’en allemand – et en finnois dans une traduction littérale, la joie du dommage – bien que ce soit un sentiment que tous les peuples de la terre sont capables de ressentir : se réjouir des ennuis d’autrui, la vengeance du pauvre.

mardi 15 juin 2010

Métempsycose



Mon père, grand esprit scientifique devant l’éternel, a quitté cette vallée de larmes l’année dernière pour aller rejoindre, du moins je l’espère, les terrains de chasse de ses ancêtres, accueilli sans doute par plusieurs milliers de vierges qui l’attendaient dans des jardins verdoyants.

Nous qui sommes restés de ce côté-ci de l’au-delà avons eu à trier les affaires mortelles qu’il a laissées derrière lui. Comme c’était à prévoir, il y avait beaucoup de banal, mais aussi quelques surprises amusantes ou émouvantes. Comme ce petit carnet gris rempli de formules mathématiques, datant des années -60 et qu’il a religieusement gardé dans un tiroir toutes ces années. J’ai eu à nettoyer, en vue des les donner à recycler, deux de ses ordinateurs portables. J’y ai découvert de très vieilles photos scannées (1), ainsi qu’une photo plus récente de mon père, lors d’une visite au CERN. C’était presque surréaliste de revoir mon père, tel qu’il était ces dernières années, mais avant qu’il ne tombe malade ; une photo que je n’avais jamais vue auparavant. C’était très étrange…. Parcourir ses fichiers m’a permis de me rendre compte à quel point la ville de ses origines lui tenait à cœur, malgré toutes ces années passées à l’étranger. J'ai découvert aussi que, malgré son intelligence excessive, il n’allait pas forcément toujours chercher très loin. C’est ainsi que j’ai réussi à deviner, sur une intuition, le mot de passe de l’un de ses ordinateurs : kuopio(2). What else ?

Nous avons porté six sacs Migros remplis de livres de maths et de physique à la bibliothèque de la faculté de mathématiques, qui était ravie ; un gros sac rempli de salade de câbles et d’adaptateurs en tous genres pour l’association Réalise (3) ; des habits et des chaussures pour Emmaüs, bien sûr ; une trentaine de dictionnaires, que j’ai transportés 5kg à la fois, jusqu’à Strasbourg, où des collègues finlandais ont pris le relais ; une collection de pièces de monnaies d'Iran, d'Argentine, du Japon ou d'ailleurs, datant des années -60 ou plus anciennes, qui ont atterri chez un numismate; et enfin, deux règles à calcul et deux calculatrices avec des fonctions sinus et cosinus, qui ont fait le bonheur de la faculté des sciences. Mon interlocuteur trouvait une de ces calculatrices tellement formidable – il a eu la même dans les années -80, ça l'a rendu tout nostalgique – qu’il ne comprenait pas que je ne souhaite pas la garder. Il est loin de se douter que depuis le jour où j’ai passé mon bac, j’ai pris grand soin de ne plus jamais croiser le moindre logarithme sur mon chemin.

Ainsi, les cendres de mon père, qui s’ennuient dans leur urne, n’ont toujours pas été dispersées conformément à ses vœux. Mais son esprit athée a trouvé le moyen de voyager et de revivre aux quatre coins du canton et au-delà, que ce soit dans un vieil ordinateur qui a trouvé un nouveau foyer, peut-être même en Afrique, par le biais d'un livre sur le dernier théorème de Fermat qui fait sans doute le bonheur d’un étudiant ou encore sur le bureau d’un compatriote qui traduit, comme lui, des modes d’emploi techniques.
A chacun sa réincarnation.
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(1) on peut en voir quelques unes dans le tout premier billet de ce blog
http://tiina-gva.blogspot.com/2010/05/commencons-par-le-commencement.html
(2) ville de Finlande, où mon père a vécu jeune
(3) http://www.realise.ch/

vendredi 11 juin 2010

To baby or not to baby



Lorsque la Finlande a adhéré à l’Union européenne en 1995 et que j’ai commencé à travailler régulièrement pour les Institutions européennes, j’ai eu l’occasion de faire la connaissance d’un grand nombre de Finlandais, qu’il s’agisse de collègues ou d’autres personnes. Ce qui m’a frappée, c’est que toutes ces personnes, quasiment sans exception, me demandaient "si j’avais de la famille". Et moi d’expliquer que mes parents ceci, ma sœur cela…

Un beau jour, j’ai enfin compris que ce qu’on me demandait réellement c’était si j’étais mariée et si j’avais des enfants. En Finlande, cette question, qui passerait pour plutôt indiscrète partout ailleurs, est la façon la plus courante et la plus naturelle d’entamer la conversation avec un(e) inconnue(e). Il paraît acquis que tout le monde a sa petite famille, ce qui permet ensuite de se raconter mutuellement combien d’enfants chacun a, les dents de lait, les oreillons du petit dernier, les cours de piano, le club de foot ou les louveteaux, bref une conversation sans réel danger. On évite ainsi de parler de soi.

Ayant compris cela, je me suis mise à répondre à cette inévitable question par la négative, par ailleurs fidèle à la vérité : "Non, je n’ai pas de famille", ce qui jetait un petit froid. Ah… de quoi va-t-on parler, alors… ? En disant cela, je m’entendais dire : "Je n’ai pas de famille, je suis toute seule, je suis orpheline, personne ne m’aime…", alors que pour moi, la famille englobe aussi ses propres parents, ses frères et sœurs, les nièces et les neveux, Papy et Bonne Maman, le cousin Georges, Tatie Danièle et Tonton Marcel, en l’occurrence Kirsti täti et Atski eno (1). C’est sans doute là le sens français du terme "famille"; en finnois on distingue la famille nucléaire, perhe, de suku lorsqu’on englobe tout l’arbre généalogique, ce terme signifiant la lignée (Geschlecht en allemand, mais on n’utilise ce terme que chez Wagner ou dans la littérature ancienne, il me semble).

La Finlande a beau passer pour un pays moderne, pionnier du droit de vote des femmes, une femme président, etc… les traditions ont malgré tout la peau dure. Si on veut être dans la norme, on se marie et on fait des enfants. Cette question m’énerve parfois tant que j’ai envie de répondre que je suis divorcée ou veuve, que j’avais des enfants mais qu’ils sont tous morts ou encore que je suis lesbienne, tendance cuir. Mais à quoi cela servirait-il ?

En Suisse, en France ou n’importe où ailleurs, on ne me demande pas quel est mon état civil ni quelle est ma vie sexuelle – comme le fait Uncle Geoffrey dans le Journal de Bridget Jones : So… Bridget, how’s your sex life ?, question qu’on ne pose évidemment jamais aux couples mariés.

Avoir des enfants ou pas ne devrait pas être un banal sujet de conversation, c’est quelque chose de beaucoup trop sensible pour un grand nombre de personnes : ceux qui n’arrivent pas à en avoir, ceux qui en ont trop, ceux qui ont un enfant handicapé ou caractériel, voire délinquant ou toxicomane. Et encore faut-il trouver un homme vaguement potable pour les faire, ces satanés gamins ! Non, je n’ai pas d’enfants et, à ce jour, je ne l’ai jamais regretté. C’est une lourde responsabilité, un travail à plein temps et un engagement qui dure toute la vie.
Thanks, but no thanks !

***

Dans un prochain billet, vous découvrirez ce que je pense des gynécologues. Par exemple, celui qui m’a dit : "Oh, mais vous allez avoir 39 ans ! Il serait temps de penser à faire des enfants !" Il ne m’a plus jamais revue.
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(1) tante Kirsti et oncle Atski ; en finnois, il y a un mot à part pour désigner l’oncle du côté maternel. On m’a dit qu’en arabe, il y a environ 45 mots pour désigner un cousin ou une cousine, selon le côté de la famille, le degré, la 1ère, 2ème ou 3ème épouse, etc…



Illustration tirée de www.mamannonmerci.blogspot.com

dimanche 6 juin 2010

Une maille à l’endroit, une maille à l’envers



Récemment, j’ai vu dans le journal l’avis de décès de ma maîtresse de couture, décédée à l’âge de 88 ans. Ça m’a soudainement replongée 40 ans en arrière. J’ai revu en souvenir cette vieille fille, dont la vie ne devait pas être bien passionnante et qui venait à l’école en Velosolex. Elle aurait pu être un personnage dans un film avec Fernandel et Bourvil. Elle est probablement morte dans le village, que dis-je, dans la maison qui l’a vue naître. Une vie aux antipodes de la mienne.

Et voilà que je me suis mise à repenser à tout ce que cette demoiselle m’a apporté. J’aimais beaucoup le cours de couture, j’aimais beaucoup l’école tout court. J’y apprenais plein de choses amusantes, intéressantes et utiles et j’étais assoiffée de tout apprendre. Pendant mes loisirs, je lisais même le dictionnaire. En lisant Tristan et Iseult, je cherchais des mots comme destrier et hanap, qui m’ont bien servi plus tard dans la vie.

J’adresse mille mercis à Mademoiselle, grâce à qui j’ai tricoté de nombreux pulls, bonnets, moufles, chaussettes, tant pour moi que pour les autres. C’est grâce à elle que je peux resserrer la taille des jupes et raccourcir les ourlets des pantalons que j’achète, toujours respectivement trop larges à la taille et trop longs.

Une de mes amies d’enfance n’a pas du tout les mêmes souvenirs que moi, alors qu’il s’agit pourtant de la même personne : "Je me rappelle qu'elle était d'une méchanceté à toute épreuve. Son souvenir m'est revenu récemment, en association avec l'évocation de mon arrière-grand-mère maternelle à l'occasion du repas de famille à Neuchâtel où je suis allée avec mon mari en avril, arrière-grand-mère à qui j'avais offert les épouvantables pantoufles couleur caca d'oie que Mademoiselle nous avait fait tricoter (à la sueur du front de ma mère, qui tricotait à ma place pour éviter que Mademoiselle ne me traite de "malhonnête" et ne me tape sur les doigts avec sa règle, ce qu'elle avait l'habitude de faire quand on ratait une maille ou qu'on n'avait pas tricoté le nombre considérable (pour l'empotée de ses doigts que j'étais) de rangs qu'elle donnait à faire à la maison."

Je me rappelle parfaitement ces "pantoufles", même que j’ai appris le mot "caca d’oie" en cette occasion. Pour moi, c’était simplement un exercice pour apprendre les augmentations et les diminutions, fort utiles au demeurant pour quiconque prétend tricoter quoi que ce soit d’autre que des maniques.

Je profite de ce blog pour informer toute la galaxie que j’ai même reçu le prix de couture au terme de la sixième année d’école primaire, ce qui m’a d’ailleurs coûté d’abondantes moqueries de la part de ma sœur.

Malheureusement, je ne tricote plus. Ma dernière œuvre remonte à 16 ans, lorsque j’ai tricoté deux petits maillots identiques pour mes nièces qui venaient de naître. Je ne sais même pas si j’y arriverais encore. Probablement que le tricot, c’est comme le vélo, si on n’avance pas on tombe… ou plutôt : ça ne s’oublie jamais. Mais ce qui me manque surtout, c’est le temps et la patience.
* * *
PS : pour contrebalancer ce tableau un peu trop flatteur, je tiens à préciser que j’ai toujours été archi-nulle (empotée, pour reprendre le terme de mon amie ☺) en gym. Pendant toute ma scolarité, j’ai subi l’humiliation d’être la dernière qu’on choisissait dans les équipes de basket ou de volley. Au collège, en Finlande, j’avais des résultats catastrophiques au test de Cooper, qui consiste à mesurer la distance courue en six minutes. Traumatisme éternel.


vendredi 4 juin 2010

Le suédois est-il intraduisible ?



Après m’être grattée la tête de perplexité face à la VF de Millénium, j’ai vécu un sentiment de déjà-vu en lisant un polar de Sjöwall & Wahlöö, un couple suédois qui est devenu célèbre dans les années -60 avec leurs romans policiers réalistes situés en Suède, précurseurs de Henning Mankell et de son mélancolique commissaire Wallander.

Il s’agit de L’Abominable Homme de Säffle, paru en Suède sous le titre Den vedervärtige mannen från Säffle en 1967, selon le livre en suédois que m’a prêté une amie. Déjà là, l’édition française indique qu’il serait paru en 1971. La traduction française, quant à elle, est parue en 1987. Comme avec Millénium, je me réjouissais de lire un de ces romans dont j’avais tant entendu parler. Et assez rapidement, je me suis dit qu’il y avait quelque chose de pourri au Royaume de Suède.

Tout d’abord, les maladresses en français ; oh ! rien de grave, mais suffisamment gênant pour déconcentrer le lecteur un tant soit peu critique. Quelques exemples :

- "Le temps le quittait à toute allure" (p.23) – s’agissant de quelqu’un qui vient de se faire assassiner et qui agonise.
- "Ils avaient mangé de la viande grillée" (p. 24). Je n’ai encore jamais commandé de viande grillée au restaurant. L’original parle de råbiff 1), littéralement raw beef, c-à-d du steak tartare. Etrange…
- "Désirez-vous autre chose, avant que nous n’arrêtions la vente de boissons ?" Ne serait-il pas plus naturel de dire avant que nous ne fermions ? Avant que nous ne fermions le bar ? L’original dit innan kassan stänger, littéralement : avant que la caisse ne ferme.
-"Avez-vous parlé à ceux qui occupent les chambres de chaque côté de celle-ci ? demanda Martin Beck." No comment…
-"Et combien de fois ne me suis-je fait agonir ?" (p.112) On dit que les traductions vieillissent moins bien que la version originale, cette phrase en est bien la preuve 2).

La page 115 est un véritable festival :
"Lorsqu’il s’efforçait d’écrire quelque chose sans faute de suédois ni de frappe" (ça me fait penser à Victor Hugo et son "vêtu de probité et de lin blanc") ... "Il essuya ses verres de lunettes" (pourquoi pas simplement "ses lunettes"?) ... "malgré son écriture tremblée" …" Ils sont venus me prendre mon litre" (il s’agit d’une bouteille de gnôle) 3).

- "Puis il fit des yeux le tour de ceux qui se trouvaient près de lui…" (p.272)
- "Le nombre de ceux qui aimaient Gunvald Larsson se réduisait à une seule unité, facile à désigner : Rönn" (p.372). Quel francophone s’exprime donc ainsi ? Ne serait-il pas plus idiomatique de dire que ses amis se comptaient sur les doigts d’une main ?

Ensuite, les faits culturels suédois qui sont soit effacés soit présentés tels quels : "un sac en papier du monopole de l’alcool" (p. 115, palme d’or des boulettes). Quiconque est allé en Finlande, en Suède ou dans certains Etats des U.S.A. comprendra sans peine, que les autres se débrouillent.

Et puis les généreuses libertés, par exemple :
"Je ne connais pas ce nom-là dans la police". L’original dit : Är ni över huvud tagit polis? 4) c-à-d "Vous êtes de la police, au moins ?" La nuance d’ironie disparaît complètement en français.
Ou encore : Kan jag få använda min egen ? (pistol) qui devient : "Si vous n'y voyez pas d'inconvénient , je préfère utiliser le mien" (de pistolet), alors que la VO dit simplement : Je peux utiliser le mien ? Le traducteur rend l’individu bien plus courtois qu’il ne l’est.

Il est très difficile de prendre un roman – a fortiori un polar – au sérieux, de se plonger dedans jusqu’à en oublier d’aller dormir quand la traduction ne cesse de vous ramener sur le plancher des vaches. A l’occasion du Salon du Livre, j’ai découvert que cette série de dix romans allait paraître dans une nouvelle traduction. D’autant plus que certains d’entre eux (les six premiers) ont été traduits de l’anglais. Il faut croire que le nombre de ceux qui traduisaient du suédois se réduisait à une seule unité dans les années quatre-vingt !
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Le roman a été adapté au cinéma sous le titre Un flic sur le toit

(1) la lettre å se prononce o
(2) l'original dit Hur många gånger har jag blivit nerspydd?", ce qui signifie "Combien de fois ne m'a-t-on pas vomi dessus?; reste à savoir si c'est au propre ou au figuré...
(3) l'original dit kvarting, qui est une bouteille de 37,5 cl, mais là, je pinaille...

(4) en allemand, cela donnerait : Sind Sie überhaupt Polizist ? Ce qui m’a rendu attentive au mot über (över) + haupt (huvud) : pourquoi diable dit-on "au-dessus de la tête" pour exprimer un doute empreint d’ironie ?


L’Abominable Homme de Säffle, éditions Rivages /Noir
traduit par Philippe Bouquet, auteur de plus de 100 traductions du suédois, Docteur honoris causa de l'université de Linköping (Suède), Officier des palmes académiques, Chevalier de l'ordre de l'Etoile polaire, Prix de traduction de l'Académie suédoise (1988), Prix de la Fondation suédoise des écrivains (1994), Prix personnel Ivar Lo-Johansson 1995, Nominé pour le prix Aristeion 1999.


Voir aussi: http://tiina-gva.blogspot.com/2010/05/le-phenomene-millenium.html
et: http://tiina-gva.blogspot.com/2012/05/le-suedois-est-intraduisible.html

lundi 31 mai 2010

Puhutteko suomea ?

*)

Environ une fois par mois et pas plus tard qu’avant-hier, on me demande si le finnois ressemble au hongrois, si je comprends le hongrois et si le finnois est apparenté au basque ou à l’albanais. Ensuite, je dois expliquer qu’il y a une minorité d’expression suédoise en Finlande et, non, je ne parle pas le russe. Je tiens toutefois à dire à quel point je suis épatée que les gens sachent que le finnois n’est pas une langue indo-européenne et que c’est une langue bizarre qui ne ressemble à rien.

Les langues scandinaves – suédois, norvégien, danois et dans une certaine mesure l’islandais – se ressemblent ou appartiennent en tous cas au même groupe. Dans les îles Féroé, on parle le féroïen, qui est la seule langue qui soit extrêmement proche de l’islandais et qui n'a rien à voir avec les trois autres, si ce n’est qu'elles en sont dérivées. A ma connaissance, le finnois n’a aucun rapport avec le basque ni avec le turc, même si cette langue comporte aussi deux catégories de voyelles, aou d’une part et ieyäö d’autre part, qui déterminent la forme que prendra la terminaison des mots, je vous épargne les détails.

Le finnois et le hongrois appartiennent au groupe des langues finno-ougriennes, ça tombe bien. L’estonien, qui ressemble fortement au finnois, en fait partie également. Non, je ne comprends pas un traître mot de hongrois, mais j’en reconnais la mélodie et la sonorité. Si j’entends parler hongrois quelque part, j’ai l’impression d’entendre du finnois, comme un enregistrement qu'on passerait à l'envers, mais ça s’arrête là.

Quelques exemples, finnois/hongrois : kiitos / köszönöm : merci ; maanantai / hétfö : lundi ; mansikka / eper : fraise ; rakkaus / szerelem : amour ; kauppa / bolt ou csemege ou áruház : magasin ; käsi / kéz : main ; vesi / viz : eau ; ces deux derniers mots ont une vague similitude.

La même chose, finnois/estonien cette fois-ci : kiitos / kiit : merci ; maanantai / esmaspäev (littéralement : le premier jour): lundi ; mansikka / maasikas : fraise ; rakkaus / armastus (terme vielli en finnois) : amour ; kauppa / kaup ou kauba : magasin ; käsi / käsi : main ; vesi / vesi : eau.


Fasten your seatbealt while seated - Life vest located under your seat en estonien

L’estonien est une source d’amusement intarissable pour quiconque sait le finnois. Saksus signifie à la fois être allemand et être seigneur (en finnois, saksalainen = allemand). Raamattu signifie bible en finnois et livre en estonien. Nahkhiir est une chauve-souris estonienne, littéralement : souris en cuir (peau) pour les Finlandais. J’imagine une sorte de James Dean avec de grandes oreilles et de petites dents.

Ce n’est pas pour autant que je comprenne l’estonien. Je comprends bien mieux le néerlandais ou l’italien, sans doute parce que je les entends plus souvent.

Le finnois a la réputation d’être impossible à apprendre, eh bien, c’est faux. De nombreux interprètes l’ont appris, mais ce sont des fadas des langues, alors ça ne compte pas vraiment. Un jour que je flânais au marché de Helsinki, j’ai vu deux Africains qui regardaient l’étal d’un marchand de poisson. Celui-ci, pensant avoir affaire à des touristes, commence à leur présenter sa marchandise en anglais. Et les clients de lui répondre : suomeksi ! suomeksi ! (en finnois !). C’étaient des Africains francophones, qui ne savaient pas l’anglais (c’est souvent pour eux que nous travaillons en conférence) mais qui, établis en Finlande, avaient appris le finnois.

Comme quoi, quand on veut, on peut !

*) littéralement: la ville de Pori interdit de sauter du pont, autrement dit: E pericoloso sporgersi; le graffiti dit: "les habitants de Rauma ne sont pas concernés"

Le célèbre restaurant Ravintola
(ravintola signifie restaurant en finnois)

samedi 29 mai 2010

Le meilleur ami de l'homme

Peut-on encore imaginer la vie sans téléphone mobile ? C’est bien là un objet que tout le monde possède, même si chacun l’utilise à sa façon. J’en ai un depuis 1997, à l’époque c’était encore un objet rare, un peu étrange et je n’osais pas trop l’utiliser en public, de peur d’attirer les regards et de passer pour celle qui fait sa maligne. C’était un Nokia qui faisait environ 20 cm de long et qui pesait autour de 300g. Je l’ai toujours, il va commencer à prendre de la valeur au rayon des antiquités. Alors que maintenant, le dernier des adolescents boutonneux a un téléphone hi-tech, avec vidéo, lecteur mp3 et tout le toutim.

Les sms sont une véritable source de bonheur et d’amusement, je ne pourrais plus m’en passer. Je faisais une randonnée dans les Iles Lofoten en l'an 2000 - l’année du naufrage du Koursk, ceci pour situer l’anecdote dans le temps – et un des membres du groupe étaitparfaitement ahuri qu’on puisse écrire des messages, une lettre à la fois, sur un minuscule objet, ça lui paraissait complètement idiot. Quelques années plus tard, revenant d’une randonnée à cheval cette fois-ci, deux semaines à l’écart de tout réseau mobile, j’ai eu la merveilleuse surprise de trouver un texto me souhaitant un bon anniversaire lors de mon retour vers la civilisation. C’était tout simplement magique.

Maintenant, les sms sont la chose la plus naturelle au monde. Ils permettent de demander au collègue de récupérer le parapluie ou le stylo préféré qu’on a oublié en cabine ou encore d’annoncer des infos, par exemple : Kennedy assassiné ! (c’est un exemple). Combien de fois, en vadrouille le dimanche, une amie fidèle ne m’a-t-elle pas communiqué le résultat des votations (minarets, Conseil d’Etat…), apaisant ainsi ma curiosité dévorante. On peut recevoir des notifications en tout genre et en Finlande, on peut même adhérer à un syndicat par sms. Dingue !


Autrefois, c’était un status symbol que d’avoir un téléphone mobile. Il y avait même de pauvres malheureux qui avaient de faux téléphones et qui faisaient semblant, juste pour avoir l’air cool. Ça n’existe probablement plus. De nos jours, le vrai indice de l’importance d’une personne, c’est précisément de ne pas avoir de téléphone mobile, car cela signifie alors que vous avez une secrétaire qui prend les messages pour vous. Vous êtes trop important pour qu’on vous dérange. Il y a aussi la catégorie des pauvres diables qui sont assez importants pour être tenus en laisse par leur employeur avec un Blackberry, sans avoir la secrétaire qui pourrait les en délivrer.

De nombreux collègues ont plusieurs téléphones : un numéro français et un suisse ou alors un numéro belge (ceux qui travaillent souvent à Bruxelles) et un autre dans le pays de domicile. Certains ne l’utilisent que pour communiquer par sms, d’autres ne l’allument jamais, d’autres au contraire le gardent toujours allumé, il leur sert même de réveille-matin. Bien des personnes ne possèdent même plus de montre bracelet, c’est leur téléphone qui leur donne l’heure.

Récemment, j’ai franchi un nouveau cap en rejoignant la tribu des détenteurs de iPhone. Pour l’instant, je l’utilise surtout pour téléphoner et envoyer des sms. C’est tout un apprentissage pour devenir Total Addict, que le ciel m’en garde !


PS : j’ai passé ce texte au correcteur d’orthographe : il ne connaît pas : sms, iPhone, Blackberry, Addict ;-o

C'est par là que tout a commencé (Bell, 1872)

mardi 25 mai 2010

Mobility roule pour vous

Pour la première fois depuis très longtemps, j’ai utilisé une voiture Mobility*. Ayant prêté ma fidèle Opel Corsa (1996, 80.000km au compteur) à un ami pour le week-end de Pentecôte, j’ai eu besoin d’une voiture pour aller rendre visite à ma mère. Je suis membre de Mobility depuis probablement 15 ans ou plus, mais n’y ai plus recours, puisque j’ai maintenant ma propre voiture.

C’était un drôle de voyage dans le temps que ces retrouvailles avec la coopérative d’auto-partage. Au moment d’effectuer ma réservation sur internet, soudain, un grand blanc. Mon numéro de membre ? Mon code PIN ? … Panique ... petite panique... mais panique quand même. Ces numéros étaient tellement gravés dans mon corps, après tant d’années, que je n’avais même pas songé à les noter quelque part. Que faire ? Et soudain, comme un ami fidèle, les voilà qui sont revenus, un peu comme un grand percheron qui traverserait un pré pour venir chercher la carotte que vous lui tendez. Quel phénomène étrange que la mémoire…

Ensuite, le parking où je suis allée chercher la Renault Kangoo que j’avais réservée, la seule voiture disponible ce dimanche-là. Ça m’a rappelé les innombrables fois où je suis allée à mes cours d’équitation en voiture Mobility. Ça m’a aussi fait songer à une époque, pourtant pas si lointaine, où j’avais encore l’énergie de faire tout ça : réserver une voiture, aller à ma leçon, étriller un cheval en évitant de me faire bouffer la tête. Heureusement, je n’avais pas oublié ma carte de membre, celle qui permet de dévérouiller la porte de la voiture. Chaque véhicule est équipé d’un ordinateur de bord, qui sait qui a réservé quelle voiture, quand et pour combien de temps.

Etape suivante : trouver la clé de contact dans la boîte à gants, la carte du parking sur le pare-soleil, régler le siège, le rétroviseur, repérer où se trouvent la marche arrière et les clignotants. Et en voiture, Simone !

N’ayant longtemps pas eu de voiture, j’ai l’habitude de changer de véhicule (voitures de location, Mobility ou encore Opération Nez-Rouge**). Les voitures Mobility sont récentes, propres et bien entretenues. La Kangoo avait le verrouillage central et la direction assistée, ainsi qu’un très bon auto-radio, tout ce que ma vieille Opel n’a pas. J’avais malgré tout l’impression de conduire une boîte de conserve. Une boîte de conserve fort agréable, précisons-le.

L’avantage avec Mobility, c’est qu’on sait qu’on retrouve une place de parking (places réservées) et, une fois qu’on a déposé la voiture (ne pas oublier de remettre les clés dans la boîte à gants !), on s’en va l’esprit léger, on n’a plus à se préoccuper de quoi que ce soit. C’est la coopérative qui s’occupe des plaques et des assurances, du service, du lavage et de tout le reste. C’est aux clients de faire le plein, avec la carte Shell qui est dans la voiture (le code apparaît quand on la retire de l’ordinateur de bord).

On paie au kilomètre (autour de -,60/km, selon le cours du brut) et à l’heure (autour de 2,50/h, selon le type d’abonnement : sociétaire, utilisateur, abonnement unireso, etc…). Cela peut paraître cher à la course (environ 50,- pour une après-midi et une quarantaine de kilomètres), mais quand on n’a que sporadiquement besoin d’une voiture, c’est vraiment idéal.

Mobility, what else !


* http://www.mobility.ch/
** http://www.nezrouge-geneve.ch/


Ceci n'est pas une voiture Mobility:




Ça non plus!


http://www.lematin.ch/actu/economie/100-000-personnes-roule-vert-mobility-298427

dimanche 23 mai 2010

Le goût des pépins de pomme

...ou Der Geschmack von Apfelkernen, de Katharina Hagena

Quelle merveilleuse surprise que ce roman, découvert un peu par hasard. Un best-seller qui mérite bien son succès. Un roman d’une écriture très originale, avec des images surprenantes, des jeux autour des mots, qui me font avoir une pensée toute particulière pour toutes les personnes qui ont eu à le traduire. Le livre est sorti en français et a été traduit en d’autres langues également.

Le plus difficile n’est sûrement pas de trouver les équivalences aux nombreuses plantes, fleurs et fruits, qui parsèment cet ouvrage. Certains jeux de mots se laissent transposer en français – « Harriet begriff, warum Leidenschaft eben auch so heißen muß » - à propos d’une peine d’amour, on peut jouer avec le mot passion / douleur ; ou encore : « Daß ein Heim ausgerechnet Heim hieß, war eine Gemeinheit… », foyer / foyer, à la rigueur. Mais certaines phrases ont une poésie véritablement casse-gueule : « Die monddurchflutete Nachtluft funkelte von Splitterstaub und Scherben » (après qu’une jeune fille est tombée, de nuit, par les vitres d’une vieille serre abandonnée). L’air de la nuit était baigné de rayons de lune, de poussières et d’éclats de verre… ?* Un peu kitsch, non ?

Ou encore Rosemarie qui se rend compte qu’elle a « assimilé » Mira, car le nom de celle-ci est contenu dans le sien. Un nom qui contient d’ailleurs plein de choses, telles que irre, mies, Rose, Eis, Morse, Reim, Möse et Mars. Allez donc traduire ça…. Et Iris de constater qu’elle ne contient rien, juste une fleur et un œil (ouf ! ça, ça passe !)

Heureusement, j’ai tout de même réussi à mettre mes reflexes professionnels de côté pour savourer ce roman plein de mélancolie, où il est beaucoup question de la vie, de la mort, de l’amour, mais surtout de la mémoire. Une citation de Paul Valéry figure en exergue : La mémoire ne nous servirait à rien si elle fût rigoureusement fidèle. C’est une idée qui revient souvent, se souvenir est une façon d’oublier et vice-versa. La grand-mère souffre d’Alzheimer et l’auteur écrit : Celui qui oublie le temps arrête de vieillir. L’oubli vainc le temps, ennemi de la mémoire. Car après tout, le temps guérit toutes les blessures, mais uniquement parce qu’il s’allie à l’oubli. *

Un livre de femmes aussi, dans le bon sens du terme ; beaucoup de personnages féminins, la grand-mère Bertha, ses trois filles Christa, Inga et Harriet, ses petites-filles Rosemarie et Iris (la narratrice) et leur copine Mira. Les hommes ne sont mentionnés qu’en passant. Iris hérite de la maison de sa grand-mère et c’est l’occasion pour elle de démêler tout un écheveau de souvenirs, dont certains étaient bien cachés. Le tout dans le décor du nord de l’Allemagne, dans une petite bourgade si tranquille qu’il faut aller boire du vin au cimetière si on veut qu’il s’y passe quelque chose.

Selon le Nouvel Obs : « Masqué en aimable bluette, enraciné au pommier patrimonial où trois générations s'affairent à leur compote, voici un pur chef-d'oeuvre, pépins compris. »

*ceci n'est qu'une pitoyable tentative de traduction par votre serviteur. Je n'ai pas (encore) eu la VF entre les mains...

Le Goût des pépins de pomme, par Katharina Hagena, traduction de Bernard Kreiss, Anne Carrière, 268 p., 19,50 euros.


samedi 22 mai 2010

Tintin au tribunal



Monsieur Bienvenu Mbutu Mondondo, un Congolais résidant en Belgique, porte plainte contre Tintin au Congo (probablement plutôt contre la Société Moulinsart) pour racisme. Pour savoir s’il faut en rire ou en pleurer, je suis allée me procurer cette œuvre, créée en 1931 et encore en vente libre à la fnac.

A la 2ème case, on voit Milou converser, en français, avec ses copains chiens. A la page 2, Milou se fait mordre la queue par un perroquet et Tintin lui dit : « Milou, malheureux ! As-tu songé à la psittacose ? » Et Milou de lui répondre : « Dis, Tintin, crois-tu que je pourrais attraper la psittacose ? » Et voilà qu’il faudrait mettre un avertissement sur cette bande dessinée, pour que le lecteur comprenne bien qu’il s’agit d’une œuvre de fiction. Un peu comme les mises en garde sur les gobelets contenant du café : « Attention, le contenu peut être chaud ». Un homme averti en vaut deux. Et une femme aussi, bien évidemment...

Alors bien sûr que c’est colonialiste, mais pouvait-il en être autrement en 1931 ? Quelle aurait dû être la description faite par Hergé à l’époque ? Les autochtones parlaient sans doute mal le français, mais on semble oublier qu’il s’agissait pour eux d’une langue étrangère. Si on parle mal le français, on est forcément idiot. C’est en tout cas l’interprétation que font ceux qui attaquent Tintin. Une case à la page 20 où Milou dit : « Allons, tas de paresseux, à l’ouvrage ! » fait polémique également. Le fait qu’un chien affirme cela semble confirmer que les Africains sont paresseux. A la page 12 cependant, le même Milou dit, en parlant de Tintin : « Eh bien ! Où est-il, ce paresseux ? » Reporters Sans Frontières devrait porter plainte. Et à la page 14, Tintin traîte Milou de poltron. Que fait la SPA ?

En réalité, on devrait s’étonner que le WWF, la CITES et Brigitte Bardot n’aient pas encore intenté de procédure judiciaire, car les animaux sont allégrement massacrés et maltraités dans cette BD. D’abord Milou qui attrape la psittacose ; ensuite, un crocodile à qui on laisse une carabine en travers de la gueule ; 15 antilopes abattues par erreur (Tintin croit toujours tirer sur la même) ; un chimpanzé abattu froidement, Tintin le dépèce, enfile sa peau pour se déguiser, l’autre chimpanzé n’y voit que du feu (pour rappel : ceci est une œuvre de fiction) ; un lion se fait arracher la queue par Milou ; une demi-douzaine de crocodiles se fait abattre par un missionnaire ; un boa se fait ouvrir le ventre, mais n’en meurt pas ; un léopard apprivoisé attrape une indigestion après avoir avalé une éponge et bu de l’eau ; un éléphant se fait abattre par un singe (ceci est une œuvre de fiction) et Tintin emporte fièrement ses deux défenses ; et enfin, un rhinocéros est détruit à l’explosif.

Mais tout est bien qui finit bien, Tintin rentre en Europe et une maman africaine dit à son enfant : « Si toi pas sage, toi y en sera jamais comme Tintin ». N’oublions pas que ce livre s’adressait aux petits Belges et que cette phrase s’adressait plus à eux qu’aux petits Congolais.

Ce qui est certain, c’est que Tintin au Congo est un ouvrage très dangereux, à ne pas mettre entre les mains d’un public non averti.

Et maintenant, je m’en vais relire Les Malheurs de Sophie.



Voir aussi : Le Musée africain de Tervuren


Tintin acquitté - le 10 février 2012

Décembre 2023 : Tintin au Congo a dorénavant une nouvelle couverture, de laquelle le personnage africain a disparu. Voilà comment on résoud le problème du racisme : il suffit de faire disparaître les noirs !! https://www.rts.ch/info/culture/livres/14549171-tintin-au-congo-muni-dune-preface-contextuelle-et-dune-nouvelle-couverture.html 
La revue Jeune Afrique trouve elle aussi que les éditions Moulinsart et Casterman invisibilisent les Africains en pensant déracialiser la bande dessinée : https://www.jeuneafrique.com/1513559/culture/tintin-au-congo-preface-et-revisite-une-fausse-bonne-idee/


jeudi 20 mai 2010

A chacun ses écouteurs

Depuis quelques années, les collègues succombent, les uns après les autres, à la mode des écouteurs Bang & Olufsen, high-tech, gracieux, chers et fragiles mais offrant – paraît-il – un son d’une qualité exceptionnelle.



Depuis que cette mode fait rage, l’interprète qui refuse de suivre le mouvement s’énerve, jour après jour, de devoir chercher les écouteurs en arrivant en cabine et, une fois qu’elle (en l’occurrence, l’auteur de ces lignes) les a trouvés, de devoir désemberlificoter le câble qui a parfois été enroulé 8 fois autour de l’objet, le tout bouclé par un nœud hermétique. C’est ce que font les disciples de B&O lorsqu’ils enlèvent les écouteurs de papy pour mettre les leurs à la place.

Autrefois, il suffisait d’essuyer les écouteurs avec une lingette pour les nettoyer du fond de teint, crème de jour, poudre et pellicules du collègue précédent. Maintenant, il faut commencer par retrouver son outil de travail, chercher où le brancher et enfin, sortir sa lingette. Et prévoir d’arriver au travail suffisamment tôt…

En ayant finalement eu marre de toute cette petite cuisine, j’ai décidé de m’affranchir de la chasse aux écouteurs et de la petite lingette en achetant, enfin, mes propres écouteurs hi-tech. Plutôt réticente à l’idée d’avoir le son trop directement contre mes tympans, j’ai opté pour un modèle Sennheiser, dont je suis très contente. Ils sont pliables, ce qui est très pratique.



Mon modèle est conçu pour écouter de la musique sur un lecteur mp3 et comporte des coussinets isolants anti-bruit, ce qui n’est toutefois pas idéal pour le travail d’interprète. En effet, nous préférons pouvoir bien nous écouter en travaillant, on évite ainsi de hurler dans le micro.

Reste maintenant à ne pas les oublier en cabine. Ce serait dommage. Je les aime bien, mes nouveaux écouteurs, ils me servent aussi à écouter de la musique sur mon iPod. La musique adoucit mes mœurs et apaise mes nerfs, parfois un peu mis à mal par nos chers délégués.

mercredi 19 mai 2010

Origines & Racines

Combien de fois ai-je dû expliquer pourquoi il y a deux ii à mon prénom ; pourquoi je parle si bien le français alors que j’ai un nom finlandais ; mon mari est-il Finlandais ; mon père était-il diplomate ; est-ce que je « rentre » souvent en Finlande ; la Finlande me manque-t-elle, etc…

Mes collègues ont pourtant l’habitude que les noms de famille ne correspondent pas forcément à la langue de la cabine, mais je dois malgré tout leur expliquer le pourquoi du comment et non, je ne fais pas la cabine finlandaise et mon français n’est pas un retour du finnois, mais un aller-simple, un français A, comme on dit.
Personne ne s’étonne qu’une personne qui s’appelle Nunes de Souza ou Panzerotti parle couramment le français. En revanche, les Finlandais assimilés à d’autres cultures se comptent apparamment sur les doigts d’une seule main et je commence à comprendre pourquoi.

Depuis le décès de mon père, ma mère se sent isolée parmi les Français, alors qu’elle vit en France depuis depuis 1981 et qu’elle a quitté la Finlande en 1964. Elle envisage de rentrer au pays, bien qu’elle sache que le pays de ses racines n’a plus rien en commun aujourd’hui avec celui de sa jeunesse. Elle a vécu dans une bulle avec son mari, sur une île de fennitude, bien au chaud, bien en sécurité. Elle a deux filles parfaitement intégrées et francophones, mais à ses yeux nous restons sans doutes Finlandaises, donc buena gente, comme disent les gitans andalous.

Les collègues finlandais qui ont dû s’établir à Bruxelles ou à Luxembourg pour des raisons professionnelles mettent leurs enfants à l’école européenne, en section finlandaise. Ainsi, ils vont à l’école en finnois, ont des camarades finlandais, les parents se fréquentent entre eux et évitent ainsi tout contact avec la population locale. Les enfants apprennent le français comme langue étrangère à l’école et le parlent mal. Et les parents semblent trouver cela très bien. La pire des choses qui puisse arriver, c’est qu’ils se rendent soudain compte qu’ils hébergent un petit Belge à la maison. Une collègue m’a même dit : « Le français ? Mais pour quoi faire ? Ma fille est avec moi, elle n’a pas besoin de savoir le français ».

Je suis curieuse de savoir ce qu’il adviendra de ces enfants, qui seront des étrangers dans le pays qui les a vus grandir mais aussi dans leur patrie, dans laquelle ils n’auront passé que des vacances. Ils ne deviendront en tous cas pas interprètes, mon avenir professionnel est assuré…


dimanche 16 mai 2010

Rendez-vous manqués

... ou Mission Impossible

Avez-vous déjà essayé de fixer un rendez-vous avec un interprète (1) ? Y êtes-vous parvenus? C’est un véritable casse-tête. Quand deux interprètes essaient de se rencontrer pour boire un café, c’est déjà compliqué, mais à partir de trois ou plus, mieux vaut laisser tomber.

Les interprètes ont des horaires et des jours de travail irréguliers et imprévisibles. Ils savent qu’ils travaillent le 15 mars, mais s’ils savent à quelle heure ils commencent – et ce n’est pas toujours le cas – ils ne savent généralement pas à quelle heure ils terminent. L’heure de la pause-déjeuner dépend des délégués. Il est par conséquent impossible de rencontrer un ami à midi un jour où on travaille. Si l’ami est flexible et qu’il se trouve à proximité du lieu de la conférence, ça peut à la rigueur se faire.

Prendre rendez-vous chez le dentiste ou se faire livrer un nouveau frigo : mieux vaut attendre l’été ou la période des fêtes de fin d’année, périodes creuses où les contrats se font rares. Si nous disons à l’électricien qui doit venir chez nous que nous sommes absents la semaine prochaine, il nous répondra « Alors, bonnes vacances ! ». Ça ne rate jamais. Chez le commun des terriens, les voyages, ce sont forcément des vacances.

Si un interprète décline une rencontre avec vous parce qu’il travaille, mais que vous le croisez malgré tout dans la rue, ne vous offusquez surtout pas ! Sa réunion s’est tout simplement terminée plus tôt. Il aurait pu prendre ce rendez-vous chez le gynécologue, si seulement il avait su, cinq semaines plus tôt, qu’il serait libre à 11h ce jour-là. Peut-être même qu’il avait pris rendez-vous précisément ce jour-là et qu’il a dû annuler parce qu’on lui a offert un contrat qui tombait justement à cette date.

Mais ce qu’il y a de pire, ce sont les séances du soir, la relève. On vous dit de rappeler le répondeur (2), qui vous confirmera si vous travaillez à 18h ou à 20h. Dans ce cas-là, vous annulez la soirée au restaurant avec les copines, vous dites à vos enfants de réchauffer le repas au micro-ondes, vous programmez l’enregistrement de votre émission préférée. Je ne sais pas vraiment quel est le pire des scénarios : la réunion qui se termine à 18h45 et vous avez tout annulé pour rien ; l’ami à qui vous avez posé un lapin vous croise ensuite dans la rue et pense que vous n’êtes vraiment pas sympa. Ou alors, la séance qui s’éternise jusqu’à 21h et vous tenez le coup grâce au dernier sandwich que vous avez réussi à attraper au bar, juste avant qu’il ne ferme, ou grâce au Bounty acheté à l’automate. Encore mieux : grâce au sandwich longue conservation acheté à l’automate (encore faut-il avoir de la monnaie). Troisième option : la relève de 21h à 24h, le cauchemar… impossible de s’endormir avant 2h du matin, à cause du cerveau qui continue de carburer. Il est vrai qu’en échange, on aura eu l’après-midi de libre (Vite ! chez le coiffeur !)

Entre interprètes, on s’entend à demi-mot. On comprend parfaitement que le collègue et néanmoins ami ne peut rien promettre avant d’avoir écouté le répondeur. On évite d’acheter des billets pour un spectacle en semaine, à cause du maudit risque de séance du soir. Car c’est en général précisément le soir pour lequel on a un billet pour les Rolling Stones qu’on vous colle une relève à 19h. Qui se terminera à 19h05 et vous aurez déjà refilé votre billet à quelqu’un d’autre. I can’t get no… satisfaction !



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(1) Il va de soi que le masculin représente les interprètes des deux sexes
(2) Dans les organisations internationales, nous appelons un répondeur qui nous donne notre programme, une demi-journée à la fois. Cela fera l’objet d’un prochain article.

Texte à paraître dans Hieronymus (juin 2010), http://www.astti.ch/

samedi 15 mai 2010

Le phénomène Millénium

Le succès phénoménal de la trilogie Millénium de Stieg Larsson, me laisse perplexe. A la demande pressante de ma mère, qui a avalé les trois tomes et qui les a même relus plusieurs fois, j’ai fini par me lancer dans le premier tome, Les hommes qui n’aimaient pas les femmes. Et comme c’est un phénomène de société, un peu comme facebook, j’ai essayé, juste pour savoir de quoi qu’ils causent, tous, là… Ma foi, les deux autres tomes attendront.

J’ai tendance à me méfier des best-sellers, pas par préjugé mais par expérience : je n’aime pas Marc Lévy, je n’aime pas Douglas Kennedy, pas même en VO…

Au bout de 50, 100, 150 pages, je commençais à me demander ce qui clochait chez moi, parce que je ne ressentais pas l’effet "pot de nutella", rien à faire. Et puis, j’ai commencé à me rendre compte que c’était terriblement mal écrit. Ou plutôt, terriblement mal traduit. Une bonne traduction sait se faire oublier; la mauvaise ne cesse d’attirer l’attention sur elle. Et ça, c’était avant de découvrir l’article assassin du NouvelObs *), qui m’a rassurée, car je n’étais pas la seule à trouver le texte franchement mauvais. Pour tout dire, vers le milieu, je suis passée à une traduction allemande et c’est le jour et la nuit ! L’allemand est certainement plus proche du suédois, mais ce n’est pas une excuse.

Quelques perles:
"Il fait un peu fonction de l'obligatoire original du village" (à propos d'un peintre) p. 141
"Sa dernière pensée avant de s'endormir fut que le danger était grand et imminent que l'isolement le rende fou" p. 149
"le demeuré local" (l'idiot du village, sans doute...) p. 151
"elle la salua d'un mouvement poli de la nuque" p. 112
"Le signal ne pourrait aussi être que clairement perçu: on amenait le pavillon de la peste flottant au-dessus de la rédaction de Millénium et le journal avait des protecteurs qui n'étaient pas près de céder" p.217
"Les entreprises Vanger... formaient toujours un groupement industriel de poids et capable de jouer sur la place publique si nécessaire" p. 217
"Une conclusion s'imposait progressivement: la seule voie carrossable qu'il pouvait emprunter était d'essayer de trouver les motivations psychologiques des personnes impliquées" p. 225
"Je ne veux pas me réveiller demain matin avec toi ici, avant que j'aie mis de l'ordre dans mes muscles et mon visage" p. 237
"La réceptionniste de l'hôtel perdu des lointains nordiques... n'en n'avait jamais entendu parler" p.356

Les bras m'en tombent et je reste sans voix...
Et puis évidemment, "définitivement" et "éventuellement" utilisés dans le sens anglais, à tout bout de champ.
"... elle s'était éventuellement ... intéressée de loin à un garçon..."
Peut-on tomber éventuellement amoureux ?

Cette traduction d’anthologie a été commise par Lena Grumbach et Marc de Gouvenain, directeur de la série actes noirs chez Actes Sud, donc pas le premier venu. Cette maison d’édition a toutefois fait ses choux gras avec Millenium, en dépit de sa VF calamiteuse.

En fait, la vie de Stieg Larsson donnerait matière à un roman : sa copine/concubine n’a hérité de rien, étant donné qu’ils n’étaient pas mariés et n’avaient pas d’enfant. Le père et le frère de Larsson, avec qui il n’était pas particulièrement proche, ont tout raflé (un peu comme Henrik Vanger qui ne tient pas à ce que sa fortune aille forcément aux membres de sa famille….).

« Lundi soir, à sa demande, Eva, la veuve de Stieg Larsson, le journaliste d'investigation spécialisé dans l'extrême droite suédoise, et auteur du best-seller Millénium n'était pas invitée à l'avant-première mondiale du film. «Tout cela ne me concerne plus, je veux qu'on me laisse tranquille», suppliait-elle, visiblement émue. Depuis le décès brutal de son compagnon en 2004, des suites d'une crise cardiaque, cette Suédoise connaît un double deuil : la perte de son grand amour avec lequel elle a vécu trente-deux ans. Et la douleur de découvrir que, jamais mariée, sans enfant et faute de testament, elle n'a aucun droit sur l'œuvre qu'elle a vu écrire. La fortune générée par les livres et par le film va au père et au frère de Stieg. » Le Figaro, Culture, 18.2.2009_______________________________
*) L'article du NouvelObs :http://bibliobs.nouvelobs.com/romans/20080417.BIB1139/les-bourdes-de-millenium.html

Voir aussi: http://tiina-gva.blogspot.com/2010/06/le-suedois-est-il-intraduisible.html
et http://tiina-gva.blogspot.com/2012/05/le-suedois-est-intraduisible.html

Les hommes qui n'aimaient pas les femmes, Millénium 1, de Stieg Larsson, Actes Sud


La longue marche

...pour devenir traductrice-jurée

Il arrive régulièrement qu’on m’appelle pour me demander de faire des traductions « officielles », c’est-à-dire de traduire des actes de naissance ou des certificats de décès, de finnois en français, avec le sceau prouvant que la traduction est fidèle et qu’elle a la même valeur juridique que l’original. Jusqu’à présent, ça m’a toujours cassé les pieds mais j’ai finalement décidé de franchir le pas. Finalement, pourquoi pas ? On ne sait jamais, ça peut déboucher sur des expériences intéressantes.

La fonction de traducteur-juré n'existe que dans les cantons de Genève et de Neuchâtel. Il doit y avoir des raisons historiques à cela, certainement liées à la France, car les TJ existent bel et bien dans le pays voisin.

La porte est étroite et le chemin ardu pour parvenir à cet immense privilège. Il faut montrer patte blanche et surtout, faire preuve d’une détermination sans faille. En sus du curriculum vitae, lettre de motivation, photocopie d’une pièce d’identité et des diplômes de traducteur ou de tout autre titre universitaire, il faut fournir :

- une attestation de non-poursuites (17,-)
- un extrait du casier judiciaire fédéral (20,-)
- un certificat de bonnes vies et mœurs, document cantonal (50,-). Pour l’obtenir, il faut présenter l’extrait de casier judiciaire. Il vous en coûte donc 70,- pour prouver que vous n’avez commis aucun délit
- une attestation de domicile (25,-), car il faut obligatoirement résider dans le canton de Genève. Pourquoi … ? Mystère et boule de gomme.

Ayant rassemblé tout un dossier, je me suis mise à attendre…. Mais voilà, mon dossier était incomplet. La Chancellerie d’Etat veut une lettre de motivation en finnois, qu’ils devront faire traduire par quelqu’un d’autre, même si je ne veux traduire que vers le français. Il fallait aussi que je présente des traductions, 3 par an pour les 5 années écoulées, pour prouver ma pratique du métier de traductrice, mes diplômes et lettres de recommandation ne suffisant visiblement pas. Le fait que je sois interprète depuis bientôt 20 ans compte pour beurre. Visiblement, le style compte pour beaucoup dans la traduction de jugements de divorce.

Fort heureusement, j’avais de quoi leur fournir 15 textes, que j’ai dû sérieusement caviarder, vu la nature hautement confidentielle de ces documents (une affaire pénale encore en cours). Cela dit, je me demande si les traducteurs-jurés du serbo-croate ou du farsi ont des diplômes de traducteur et 3 textes de nature juridique par an à présenter.

Je ne suis toutefois pas encore au bout de mes peines. Mon dossier sera instruit, enquête de police & C°, puis je devrai passer un examen et payer un émolument de 300,-, renouvelable tous les cinq ans. Après quoi, je devrai prêter serment et j’obtiendrai le sceau magique faisant de moi une traductrice assermentée.

Il ne me restera plus qu’à attendre les mandats, pour amortir tout cet investissement… !

www.ge.ch/traducteurs



PS: je viens de recevoir (15.7.2010) une lettre m'annonçant que mon dossier est complet et qu'il sera soumis au Département de la sécurité, police et environnement pour l'enquête de police; de là, il sera transmis à la Commission d'examen des traducteurs-jurés.

PPS: A compter d'aujourd'hui, 10 mars 2011, c'est-à-dire un an après avoir entamé les démarches, me voilà traductrice-jurée. J'ai prêté serment et, en échange, j'ai reçu un tampon portant mon nom me permettant d'officialiser mes traductions.

vendredi 14 mai 2010

Trivial Pursuit

Un interprète doit tout savoir. Ou du moins, il doit savoir un peu de tout. Ou alors, faire semblant. La Slovaquie fait-elle partie de la zone euro ? La Norvège de l’espace Schengen ? Le Swaziland est-il un royaume ? Quelle est la capitale du Guatemala ? Comment s’appelle le premier ministre du Japon ? Allez, je vais vous donner la réponse : Yukio Hatoyama. On ne sait jamais, ça peut servir un jour. En effet, nos orateurs peuvent parler de tout et de n’importe quoi. A l’OMC, ils vont parler de commerce et de droits de douane, pensez-vous naïvement. Dans une réunion d’une confédération syndicale internationale, ils vont forcément parler de conditions de travail et de grèves de solidarité. Certes, mais il y a justement la campagne de soutien aux travailleurs des plantations de canne à sucre au Guatemala ou le dernier sommet de l’ANASE, qui s’est tenu, comme chacun le sait, à Hua Hin, en Thaïlande. Et ces noms propres, lorsqu’ils sont prononcés, par exemple, par un hispanophone, on ne les reconnaît pas forcément.

C’est pourquoi les interprètes s’accrochent avec l’énergie du désespoir à tous les documents dont ils peuvent s’emparer. Mais qui diable est Lansana Conté ? Ah ! feu le président de la Guinée. Quand les interventions vont très vite, il est parfois difficile de distinguer les morts des vivants ou les persécuteurs des persécutés. Penser à dire CEDEAO (1) et ne pas retraduire par ECOWAS, même si ce sigle est prononcé en français par un italien s’exprimant en anglais. Dans ces cas-là, il est beaucoup plus facile de lire bêtement ce qu’on a sous les yeux, ce qui permet de débrancher le cerveau pour ce petit élément-là et garder ses précieuses provisions intellectuelles pour le reste : un discours prononcé à bride abattue et à Toute Grande Vitesse (TGV pour les intimes), comme si la vie de l’orateur en dépendait.

Ainsi, prenant la relève de l’équipe précédente, je suis tombée sur ces gribouillages, laissés par le collègue qui m’a précédée : « protocole de pêche, suspension, Conakry, exécution, Mahmoud Ahmadinejad, art 10, bourreaux, pendaison, combustible nucléaire, peine de mort, Lansana Conté, CPI, ayatollah, mollah, Cotonou, 250.000 (morts ? dollars ? années-lumière ?), réconciliation, militaire » En effet, l’ordre du jour comportait un point « droits de l’homme : Guinée, Iran, Sri Lanka ». Le point de la situation de ce dernier pays a été interprété par mon équipe et nous avons eu droit au LTTE, à 90.000 morts (voir ce chiffre écrit évite de dire des bêtises dans le feu de l’action), à l’article 122 paragraphe 5, ainsi qu’aux résolutions du 18 mai 2000, du 14 mars 2002, du 20 novembre 2003 et du 18 mai, ainsi qu’au journaliste sri-lankais J.S. Tissaininayagam.

En l’absence de tout document, on fait comme on peut… On répète phonétiquement ou on dit pudiquement « le journaliste », les délégués sauront bien de qui on parle, sinon, ma foi, qu’ils se renseignent ! Nous ne pouvons bien évidemment pas tout savoir, mais honte à celui qui ne connaîtrait pas Aung San Suu Kyi (heureusement qu’on ne nous demande pas de l’écrire) ou Barack Obama, ce qui est tout de même peu probable. Mais si la bouche n’arrive pas à suivre les ordres du cerveau, il peut arriver qu’on dise Oklahoma au lieu de Yokohama. Et là, il vaut mieux que les délégués aient les documents de la conférence, afin qu’ils réservent un vol pour le bon continent.

(texte rédigé en octobre 2009, les noms et les lieux varieront forcément avec le temps qui passe)
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(1) Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest ; Economic Community Of West African States

Texte paru dans la revue Hieronymus (mars 2010), www.astti.ch

My Tailor Is Rich

L’apprentissage des langues est un processus mystérieux, un peu comme l’oreille musicale ou la bosse des maths. Certaines personnes absorbent les langues avec beaucoup de facilité alors que d’autres demeurent totalement imperméables. L’arabe, le chinois, le japonais ont la réputation d’être impossibles à assimiler pour quiconque ne serait pas né dans ces cultures, étant donné non seulement la graphie et l’alphabet totalement différents, mais également toute la culture entourant la transmission du message. Comme par exemple ce marin qui avait appris le japonais avec les filles des ports : non seulement il le parlait de façon très populaire, mais également comme une femme ! Son japonais était certes parfait, mais déconcertant pour ses interlocuteurs (1) . En effet, la langue japonaise se décline en deux versions, celle parlée par les femmes et celle parlée par les hommes.

Ce qui est certain, c’est que les enfants apprennent les langues avec beaucoup de facilité. Leur mémoire retient les mots, la grammaire, la syntaxe et la prononciation sans même s’en rendre compte. Cette faculté diminue avec l’âge. « Le don des langues paraît ne leur être ôté que par la formation du corps » constate un des personnages du roman Rouge Brésil de Jean-Christophe Rufin (2) . La République de Venise utilisait des enfants comme truchements, c’est-à-dire comme interprètes, dans ses relations commerciales avec l’Orient. « Chacun sait que l’enfant a le don des langues. Mettez un adulte captif en terre étrangère, il lui faudra dix ans pour avoir l’usage de quelques mots familiers. Un enfant, en autant de semaines, saura parler couramment et sans y mettre d’accent (3) . »

Parmi les interprètes de l’ancienne génération, celle des autodidactes, les écoles d’interprètes n’existant pas encore ou si peu, on trouve beaucoup d’enfants de diplomates, de juifs ayant émigré vers des horizons aussi divers que lointains ou encore des enfants de Républicains espagnols s’étant réfugiés en URSS. Les secundos, quel que soit leur pays d’origine ou de résidence, rejoignent aussi souvent notre belle profession. C’est la raison pour laquelle le nom ou l’origine de certains interprètes ne correspond pas forcément à leur cabine, votre serviteur en étant un bon exemple. Le cas le plus extrême que je connaisse est celui d’une jeune Ecossaise qui avait appris le finnois en Ethiopie : ses parents avaient été envoyés dans ce pays pour leur travail et la seule école, dans le coin perdu où ils se trouvaient, était celle tenue par des missionnaires finlandais. C’est aussi en Ethiopie qu’elle a découvert la tradition du sauna. Elle a toutefois fini par choisir un autre métier, contrairement à une autre collègue au parcours tout aussi exotique, une Chinoise ayant grandi au Brésil, tout en fréquentant l’école française, aujourd’hui double cabine française et portugaise.

Parmi nos plus jeunes collègues, nombreux sont ceux qui ont acquis leurs langues passives (4) à la sueur de leur front, en suivant des cours de langue et en effectuant des séjours à l’étranger. Les interprètes travaillant pour l’Union européenne étoffent leur combinaison linguistique comme d’autres collectionnent les timbres. Il n’est pas rare qu’un interprète ait cinq ou six langues passives. Ils sont nombreux également à s’atteler à l’apprentissage du polonais ou du hongrois, un peu moins nombreux toutefois à opter pour le letton ou le bulgare. Question de goût, sans doute… Le roumain a la réputation d’être facile à assimiler pour les francophones. Deux collègues ayant l’arabe dans leur combinaison linguistique ont ajouté le maltais, apparemment sans trop de difficulté.

Apprendre une langue rare est toutefois un atout à double tranchant : vous serez très demandé, avec votre compétence particulière, mais dès que la Commission européenne décidera de rationaliser le régime linguistique – épée de Damoclès éternellement suspendue au-dessus de nos têtes – vous serez Gros-Jean comme devant, avec vos verbes irréguliers estoniens dont plus personne ne voudra. Vous pourrez toujours essayer de vous reconvertir dans la pêche au hareng !

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(1) George Mikes, Land of the Rising Yen, André Deutsch, 1970
(2) Jean-Christophe Rufin, Rouge Brésil, Gallimard, 2001
(3) Ibidem
(4) On appelle “ langues passives ” les langues à partir desquelles on interprète, la langue active étant celle qui est parlée dans le micro.

Texte paru dans la revue Hieronymus (décembre 2009), www.assti.ch

Leadership Through Empowerment

Allow me briefly to present our strategic plan for multi-party governance. This effort will be carried out by the grassroots in order to guarantee a sense of ownership amongst the main stakeholders. Advocacy efforts will not be left aside as we wish to be inclusive with an element of gender mainstreaming in order to reach an enhanced member-driven outcome. A workshop is planned for an exchange of best practices, followed by the presentation of a series of case studies on certification and labelling practices for an environmentally sustainable three-year two-tiered outreach dimension. Horizontal national policy coherence programmes will be high on the agenda of the 23d session on National, Regional, Bilateral and Multilateral Negociations. Emerging policy issues will be tackled by representatives of UNCTAD, UNEP, WIPO and the UNFCCC (1). With this new bottom-up paradigm we will reach a level playing field, as foreseen in the Johannesburg Declaration of 2003, signed by 117 States parties. The forthcoming conference will be attended by 47 intergovernmental organisations and 82 non-governmental organisations, as well as representatives of the HIPCs, SVEs, LDCs and NFIDCs (2).

Vous n’avez rien compris? Ne vous en faites pas, c’est normal. Voilà le genre de langue de bois auquel sont confrontés, jour après jour, les interprètes qui travaillent dans les organisations internationales. Peut-être suis-je la seule à me sentir découragée face à ce qui ressemble fortement à du brassage d’air. Et, comme il est souvent difficile d’extraire le sens de ce type d’intervention, qui équivaut à un message en langage codé, la seule stratégie à suivre est celle des correspondances sémantiques : advocacy = plaidoyer ; ownership = appropriation ; sanitation = assainissement (3) , etc… Les délégués s’y retrouvent, du moins on l’espère. Ils utilisent d’ailleurs très souvent les mots de cette novlangue de conférences en V.O., étant incapables, contrairement à nous, de trouver les équivalences.

Vous vous demandez sans doute comment nous faisons pour les trouver, ces équivalences ? Eh bien, grâce aux traducteurs. Nous réclamons toujours les documents de la conférence dans nos langues de travail, pour apprendre comment faire passer le message avec les mots justes. Certains termes ou expressions resteront des casse-tête à tout jamais. Par exemple victimisation, qu’il faut traduire par toute une phrase, à moins d’opter pour le néologisme “victimisation”, dont personne ne s’offusquera sans doute, du moins parmi les délégués (quant aux interprètes, c’est une autre histoire…). Le programme de réforme de l’ONU, ONE U.N. passe bien en espagnol : UNA ONU ; toutefois, l’équivalent français reste à trouver, UNE ONU [unonu] étant un peu ridicule à l’oreille.

Ces nouveaux mots fleurissent comme les mots d’argot, nul ne sait trop d’où ils sortent ni qui les invente. Ce qui fait qu’il y a toujours une certaine période de flou entre la première apparition du néologisme et le jour béni où, enfin, on comprend ce qu’il veut dire. Reste ensuite à trouver une bonne transposition dans nos langues respectives. Prenez par exemple to engage : de nos jours, we engage with the World Bank. Autrefois, on disait to approach, to talk to ou parfois même to caucus ou to liaise… Mais c’est devenu terriblement démodé. On entend parfois des francophones dire qu’ils ont approché le directeur, bientôt ils vont dire : “on engage et on s’fait une bouffe” ? Je vous aurai avertis…

L’essentiel, quoi qu’il advienne, c’est de toujours think outside the box !

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(1) United Nations Conference on Trade and Development, United Nations Environment Program, World Intellectual Property Organisation, United Nations Framework Convention on Climate Change
(2) Highly Indebted Poor Countries, Small and Vulnerable Economies, Least Developed Countries, Net Food Importing Developing Countries
(3) Discret euphémisme signifiant des WC : grave problème dans les pays en développement, qui empêche les fillettes d’aller à l’école, surtout pendant leurs menstruations. Englobe également l’eau courante et les égoûts.

Texte paru dans la revue Hieronymus (septembre 2009), www.astti.ch


Techno-freaks

Qui parmi vous utilise encore le fax ? Qui se souvient encore du temps où on avait ce petit appareil qui faisait une petite musique permettant de consulter son répondeur à distance ? C’était aussi l’époque où on glissait des pièces de monnaies dans des cabines téléphoniques. Les enfants vont bientôt nous demander ce qu’est une cabine téléphonique. D’ailleurs, y a-t-il encore des gens qui écoutent leur répondeur ? Qui se souvient des téléphones à cadran rotatif, sur lesquels on mettait une éternité à composer des numéros internationaux, à cause du zéro qui faisait tout le tour ? Et pas de bouton redial, si ça sonnait occupé !

La technique évolue si rapidement que pas un jour ne passe sans qu’on ne nous annonce une nouvelle fonctionnalité sur iPhone ou des cartes GPS à télécharger par SMS. A quand le MP3 qui vous massera les pieds ? A quand le notebook qui remplira vos grilles de sudoku pendant que vous dormez ?

Les interprètes n’échappent bien sûr pas à cette vague galopante de modernité, qui met à jour un intéressant fossé des générations. A l’apparition d’internet et du courrier électronique, nombre de collègues ont pris peur et se sont sentis écartés par ces nouvelles technologies étranges et quelque peu effrayantes. Certains s’y sont mis très vite et les réticents ont été bien obligés de prendre le train en marche, s’ils ne voulaient pas rester sur le bord du chemin.

Tous les interprètes de moins de 35 ans ont un ordinateur portable en permanence sur eux et la première chose qu’ils font en arrivant au travail est de l’allumer. Plus l’interprète est âgé et moindre est la probabilité qu’il ait un ordinateur en cabine. J’ai vu une (jeune) collègue parler tendrement à son ordinateur dans un corridor : elle était en train de téléphoner avec skype. D’autres communiquaient d’une cabine à l’autre par le biais d’un chat (non, pas celui qui fait miaou !) : un mode de conversation silencieux, la solution idéale pour les cabines d’interprètes.

Les ordinateurs servent donc à téléphoner, à converser à travers les vitres ou encore à accepter des offres de travail reçues par e-mail ; ils permettent bien sûr aussi de découvrir quelle est la devise du Yémen ou la capitale de la Lituanie, de consulter ses glossaires, de vérifier ce qu’est la coumarine et si Couchepin est encore / à nouveau président de la Confédération. De nombreuses chaînes de radio sont accessibles sur internet, un outil formidable pour l’apprentissage des langues, surtout pour se former l’oreille aux différents accents et prononciations.

Malheureusement, les délégués ont eux aussi des ordinateurs. De plus en plus souvent, au lieu de parler de façon naturelle, ils lisent un texte directement sur leur écran, ce qui signifie qu’il nous est impossible d’en recevoir une copie sur papier. Certains délégués viennent vers les cabines en montrant fièrement une clé usb contenant leur exposé, afin que les interprètes le transfèrent sur l’ordinateur qu’ils ont intérêt à avoir. Certains groupes de délégués travaillent ensemble sur le même texte par le biais d’un groupe Google, certainement très pratique pour eux, mais dont les interprètes sont exclus. Ils savent tous que could a été remplacé par should, mais comment faire pour le savoir ? Récemment, il est même arrivé qu’une déléguée lise aux participants un projet de communiqué de presse qu’elle venait de recevoir sur son téléphone à grand écran, pour obtenir leur accord. Je l’ai vue ensuite pianoter la réponse avec un stylet.

Cela dit, l’interprétation automatique n’est pas encore pour demain !

Texte paru dans la revue Hieronymus (juin 2009), www.astti.ch


De l'autre côté du miroir

Les interprètes de conférences assistent à de nombreuses réunions, mais toujours selon le même point de vue, celui des coulisses, et ne cessent de se plaindre du comportement des délégués. Mais que se passe-t-il lorsque l’interprète change de casquette et se retrouve à son tour dans le rôle du délégué, insupportable et indiscipliné ? C’est ce qui arrive lors de chaque Assemblée de l’aiic (1) , comme ce fut le cas récemment à Nice, du 8 au 11 janvier 2009. Ce sont alors les procès-verbalistes qui assistent, avec patience et indulgence, aux échanges dans la salle.

Nos délégués ne commencent jamais leur réunions à l’heure. Les interprètes sont prêts, en cabine, sachant bien que la réunion ne commencera pas à l’heure dite. A l’Assemblée, les procès-verbalistes sont prêts, à l’heure, et attendent patiemment que les délibérations commencent. Les pauses-café de nos délégués, prévues pour 15 minutes, s’éternisent de façon systématique. Croyez-vous que les interprètes fassent autrement ? Que nenni ! Car chez eux aussi, les pauses-café servent à nouer des contacts, à trouver un candidat au poste de trésorier ou à faire circuler des consignes de vote. La journée ayant commencé avec du retard et les pauses-café ayant duré plus longtemps que prévu, oh ! surprise, la journée déborde au-delà de 18h. Et voilà que nous sommes infiniment reconnaissants aux procès-verbalistes qui ont la bonté de faire un geste !

Lors des Assemblées de l’aiic, les interprètes de cabine française et anglaise (les deux langues officielles de l’aiic) travaillent en cabine à tour de rôle, à titre bénévole évidemment, pour les collègues qui ne maîtriseraient pas l’une ou l’autre langue. Les interprètes-orateurs n’ont aucun scrupule à lire à la vitesse grand V l’article 4 des statuts ou tout autre extrait d’un texte que les interprètes n’ont pas (les procès-verbalistes non plus, mais à eux, au moins, il est utile de leur apporter le texte après l’intervention). Les téléphones mobiles sonnent de façon intempestive, comme dans toutes les réunions. De nos jours, les interprètes sont de véritables geeks : où que l’on regarde, ce ne sont que iPhones, netbooks, ordinateurs portables, téléphones mobiles avec pianotage de SMS, certains parviennent même, tels Vishnou, à alimenter le blog de l’extranet de l’aiic, tout en écoutant les débats ! Et pendant que certains lisent leurs mails, ce sont toujours les mêmes qui prennent la parole !

Une différence toutefois avec les réunions dans lesquelles nous travaillons, c’est qu’à l’Assemblée, nous suivons les discussions en continu et non pas une demi-heure sur deux, d’où une certaine fatigue. L’interprète qui travaille peut, une demi-heure sur deux, aller rejoindre la lumière du soleil et prendre un bol d’air, le délégué qui suit les débats ne le peut pas. Car – tous les centres de conférences le prouvent – les architectes ont horreur des fenêtres et de tout ce qui pourrait ressembler à de la lumière. Au terme d’une journée de débats dans le noir, on est véritablement épuisé ! Toutefois, en tant que délégué, on peut aussi se permettre de se mettre en mode snooze et n’écouter qu’à moitié, voire piquer un petit roupillon (ou aller faire du shopping – et voir la lumière du jour!).

Assister à une Assemblée de l’aiic est intéressant à plus d’un titre, mais cela devrait surtout nous apprendre à être un peu plus compréhensifs et tolérants envers nos chers délégués, car nous ne faisons guère mieux !

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(1) Association Internationale des Interprètes de Conférences www.aiic.net

Texte paru dans la revue Hieronymus (mars 2009), www.astti.ch


Commençons par le commencement


Ma mère


Mon père (à gauche, †2009), probablement 10-12 ans après la fin de la Deuxième Guerre Mondiale

ma soeur



Ma grand-mère Alviina, en Finlande


... et moi :-)