Il est dorénavant possible d’organiser des visites guidées pour groupes au CERN. Il a fallu attendre bien longtemps avant que cela ne soit possible. Autrefois, il fallait connaître quelqu’un à l’intérieur de l’organisation, il fallait venir avec son propre minibus et attendre environ 6 mois avant qu’un créneau se libère. Ensuite, tout a été bloqué et stoppé, le temps qu’ils construisent leur tout nouveau Centre des Visiteurs, le Portail de la Science, conçu par Renzo Piano et inauguré en octobre 2023 : une exposition permanente, située dans deux cylindres qui enjambent la route, évoquant les tubes de l’accélérateur de particules. Tous les jours, des exposés et diverses activités sont proposés (voir visit.cern). On peut également participer à des visites guidées individuelles, mais qui sont à réserver le jour-même, sur place, en prenant le risque que tout soit complet. Un tel système est évidemment impossible à gérer pour de plus grands groupes. Les gens sont très enthousiastes et désireux de découvrir ce site mythique. Les visites sont prises d’assaut et le Centre des Visiteurs fourmille constamment de monde. Toutes les activités, ateliers, vidéos et visites proposés sont entièrement gratuits. Il s’agit sans doute d’un effort de relations publiques pour mieux se faire connaître du public, mais aussi pour satisfaire l’immense curiosité pour les activités extraordinaires déployées par le CERN. En vertu de l’article II de sa Convention*), « l'Organisation s'abstient de toute activité à fins militaires et les résultats de ses travaux expérimentaux et théoriques sont publiés ou de toute autre façon rendus généralement accessibles ». Toutes les données deviennent publiques au bout de trois ans. Le CERN ne fonctionne donc pas dans une finalité commerciale.
Le CERN a vu le jour au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, afin de recréer un centre d’excellence en Europe, après que de nombreux scientifiques et chercheurs ont dû s’exiler aux Etats-Unis. Il rassemble 24 États européens et collabore avec de nombreux États extra-européens. Les Etats-Unis, l’Inde ou le Pakistan, par exemple, ont le statut d’observateur. Entre le personnel permanent, les chercheurs en résidence ou les universitaires de passage, on compte en moyenne 10.000 personnes présentes par jour sur le site à Meyrin. Pour travailler au CERN, il faut toutefois être ressortissant d’un des Etats membres. Le budget annuel tourne autour de 1 milliard CHF.Plusieurs modèles d’accélérateurs de particules se sont succédé au cours de ces 70 dernières années. Le synchrocyclotron, qui date de 1957, est dorénavant mis à la retraite. Le synchrotron à protons (1959) lui a succédé, puis le super synchrotron à protons (SPS, 1976), l’accélérateur proton-antiproton (1983) et enfin le grand collisionneur électron-positon, le LEP (1988), qui a été stoppé en 2000, afin de permettre la construction du LHC, le grand collisionneur de hadrons (2008). Le LHC tourne H24 et n’est mis à l’arrêt que pour Noël et pendant deux semaines en hiver.
Contrairement à Aristote qui pensait que la matière était divisible à l’infini, Démocrite affirmait qu’il existe des atomes - littéralement « qui ne peut être coupé » - c’est-à-dire des particules indivisibles. C’était bien Aristote qui avait raison : les atomes sont constitués de particules dites subatomiques, les protons et les neutrons, les électrons circulant quant à eux en orbite de l’atome. Les protons et les neutrons ont été identifiés en 1930 et les scientifiques pensaient alors qu’ils étaient indivisibles. Selon le modèle standard de la physique des particules, théorie élaborée au début des années -70, l’univers est fait de douze constituants appelés les particules fondamentales, qui portent des noms tels que quarks, leptons, bosons, ainsi que, évidemment, les antiquarks et les antileptons. Il n’a pas (encore) été possible de diviser les quarks ni les électrons, qui sont ainsi à considérer comme des particules élémentaires.
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Le CERN a le projet de construire un nouvel accélérateur, le FCC ou Futur Collisionneur Circulaire, d’une circonférence de 91 km et situé à 200 m sous terre, un projet dont le devis s’élève à 15 milliards CHF. Son but est de comprendre encore mieux les lois fondamentales de la physique. Les milieux écologistes y sont opposés, à cause du chantier immense qu’entraînera cette nouvelle construction et de son impact sur le climat. Toutefois, la Chine travaille sur le même projet et, s’il ne se fait pas en Europe, la recherche fondamentale partira à l’autre bout de la planète. Il convient alors de se demander ce qui doit primer : la recherche ou la protection de la nature ?
Pour étudier ces particules élémentaires (ou fondamentales), les chercheurs au CERN envoient des protons dans plusieurs accélérateurs pour leur permettre d’atteindre une vitesse quasi-identique à celle de la lumière au moment de leur collision. On parle d’une chaîne d’injection de protons, via le LINAC 4 (accélérateur linéaire), le booster du PS (Proton Synchrotron, en français le synchroton à protons) et SPS (Super Proton Synchrotron, en français le supersynchroton à protons). Les particules sont ensuite envoyées dans le LHC (Large Hadron Collider, le grand
collisionneur de hadrons) - à ne pas confondre avec le Lausanne Hockey Club - qui a été mis en fonction en 2008. Des aimants supraconducteurs sont placés tout au long des 27km du LHC, afin d’accélérer encore davantage les particules et accroître leur énergie. Le tuyau est refroidi à l’hélium jusqu’à -271°, car le froid absolu favorise la supraconductivité.
Lors du Big Bang, la matière et l’antimatière auraient été créées en quantité égales. Lorsqu’elles se rencontrent, elles s’annihilent mutuellement, créant de la lumière. La recherche tente de comprendre pourquoi la nature préfère la matière à l’antimatière et l’un des grands mystères de l’univers encore à percer consiste à savoir pourquoi et comment il a pu y avoir suffisamment de matière pour créer les étoiles, les planètes et toutes les formes de vie que nous connaissons aujourd’hui. L’antimatière peut servir à des fins tout à fait concrètes : les PET-scans utilisés en médecine fonctionnent avec de l’antimatière et la physique des particules contribuera sans doute à l’avenir à la lutte contre le cancer.
ATLAS Experiment |
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CMS- Higgs Event |
Le 29 septembre 2024, le CERN fêtera ses 70 ans, qui seront célébrés avec une journée Portes Ouvertes.
Pour plus de détails techniques et une visite virtuelle, voir home.cern
*) Convention pour l’Établissement d’une organisation européenne pour la recherche nucléaire (1953)