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dimanche 23 mai 2010

Le goût des pépins de pomme

...ou Der Geschmack von Apfelkernen, de Katharina Hagena

Quelle merveilleuse surprise que ce roman, découvert un peu par hasard. Un best-seller qui mérite bien son succès. Un roman d’une écriture très originale, avec des images surprenantes, des jeux autour des mots, qui me font avoir une pensée toute particulière pour toutes les personnes qui ont eu à le traduire. Le livre est sorti en français et a été traduit en d’autres langues également.

Le plus difficile n’est sûrement pas de trouver les équivalences aux nombreuses plantes, fleurs et fruits, qui parsèment cet ouvrage. Certains jeux de mots se laissent transposer en français – « Harriet begriff, warum Leidenschaft eben auch so heißen muß » - à propos d’une peine d’amour, on peut jouer avec le mot passion / douleur ; ou encore : « Daß ein Heim ausgerechnet Heim hieß, war eine Gemeinheit… », foyer / foyer, à la rigueur. Mais certaines phrases ont une poésie véritablement casse-gueule : « Die monddurchflutete Nachtluft funkelte von Splitterstaub und Scherben » (après qu’une jeune fille est tombée, de nuit, par les vitres d’une vieille serre abandonnée). L’air de la nuit était baigné de rayons de lune, de poussières et d’éclats de verre… ?* Un peu kitsch, non ?

Ou encore Rosemarie qui se rend compte qu’elle a « assimilé » Mira, car le nom de celle-ci est contenu dans le sien. Un nom qui contient d’ailleurs plein de choses, telles que irre, mies, Rose, Eis, Morse, Reim, Möse et Mars. Allez donc traduire ça…. Et Iris de constater qu’elle ne contient rien, juste une fleur et un œil (ouf ! ça, ça passe !)

Heureusement, j’ai tout de même réussi à mettre mes reflexes professionnels de côté pour savourer ce roman plein de mélancolie, où il est beaucoup question de la vie, de la mort, de l’amour, mais surtout de la mémoire. Une citation de Paul Valéry figure en exergue : La mémoire ne nous servirait à rien si elle fût rigoureusement fidèle. C’est une idée qui revient souvent, se souvenir est une façon d’oublier et vice-versa. La grand-mère souffre d’Alzheimer et l’auteur écrit : Celui qui oublie le temps arrête de vieillir. L’oubli vainc le temps, ennemi de la mémoire. Car après tout, le temps guérit toutes les blessures, mais uniquement parce qu’il s’allie à l’oubli. *

Un livre de femmes aussi, dans le bon sens du terme ; beaucoup de personnages féminins, la grand-mère Bertha, ses trois filles Christa, Inga et Harriet, ses petites-filles Rosemarie et Iris (la narratrice) et leur copine Mira. Les hommes ne sont mentionnés qu’en passant. Iris hérite de la maison de sa grand-mère et c’est l’occasion pour elle de démêler tout un écheveau de souvenirs, dont certains étaient bien cachés. Le tout dans le décor du nord de l’Allemagne, dans une petite bourgade si tranquille qu’il faut aller boire du vin au cimetière si on veut qu’il s’y passe quelque chose.

Selon le Nouvel Obs : « Masqué en aimable bluette, enraciné au pommier patrimonial où trois générations s'affairent à leur compote, voici un pur chef-d'oeuvre, pépins compris. »

*ceci n'est qu'une pitoyable tentative de traduction par votre serviteur. Je n'ai pas (encore) eu la VF entre les mains...

Le Goût des pépins de pomme, par Katharina Hagena, traduction de Bernard Kreiss, Anne Carrière, 268 p., 19,50 euros.


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