Monsieur Bienvenu Mbutu Mondondo, un Congolais résidant en Belgique, porte plainte contre Tintin au Congo (probablement plutôt contre la Société Moulinsart) pour racisme. Pour savoir s’il faut en rire ou en pleurer, je suis allée me procurer cette œuvre, créée en 1931 et encore en vente libre à la fnac.
A la 2ème case, on voit Milou converser, en français, avec ses copains chiens. A la page 2, Milou se fait mordre la queue par un perroquet et Tintin lui dit : « Milou, malheureux ! As-tu songé à la psittacose ? » Et Milou de lui répondre : « Dis, Tintin, crois-tu que je pourrais attraper la psittacose ? » Et voilà qu’il faudrait mettre un avertissement sur cette bande dessinée, pour que le lecteur comprenne bien qu’il s’agit d’une œuvre de fiction. Un peu comme les mises en garde sur les gobelets contenant du café : « Attention, le contenu peut être chaud ». Un homme averti en vaut deux. Et une femme aussi, bien évidemment...
Alors bien sûr que c’est colonialiste, mais pouvait-il en être autrement en 1931 ? Quelle aurait dû être la description faite par Hergé à l’époque ? Les autochtones parlaient sans doute mal le français, mais on semble oublier qu’il s’agissait pour eux d’une langue étrangère. Si on parle mal le français, on est forcément idiot. C’est en tout cas l’interprétation que font ceux qui attaquent Tintin. Une case à la page 20 où Milou dit : « Allons, tas de paresseux, à l’ouvrage ! » fait polémique également. Le fait qu’un chien affirme cela semble confirmer que les Africains sont paresseux. A la page 12 cependant, le même Milou dit, en parlant de Tintin : « Eh bien ! Où est-il, ce paresseux ? » Reporters Sans Frontières devrait porter plainte. Et à la page 14, Tintin traîte Milou de poltron. Que fait la SPA ?
En réalité, on devrait s’étonner que le WWF, la CITES et Brigitte Bardot n’aient pas encore intenté de procédure judiciaire, car les animaux sont allégrement massacrés et maltraités dans cette BD. D’abord Milou qui attrape la psittacose ; ensuite, un crocodile à qui on laisse une carabine en travers de la gueule ; 15 antilopes abattues par erreur (Tintin croit toujours tirer sur la même) ; un chimpanzé abattu froidement, Tintin le dépèce, enfile sa peau pour se déguiser, l’autre chimpanzé n’y voit que du feu (pour rappel : ceci est une œuvre de fiction) ; un lion se fait arracher la queue par Milou ; une demi-douzaine de crocodiles se fait abattre par un missionnaire ; un boa se fait ouvrir le ventre, mais n’en meurt pas ; un léopard apprivoisé attrape une indigestion après avoir avalé une éponge et bu de l’eau ; un éléphant se fait abattre par un singe (ceci est une œuvre de fiction) et Tintin emporte fièrement ses deux défenses ; et enfin, un rhinocéros est détruit à l’explosif.
Mais tout est bien qui finit bien, Tintin rentre en Europe et une maman africaine dit à son enfant : « Si toi pas sage, toi y en sera jamais comme Tintin ». N’oublions pas que ce livre s’adressait aux petits Belges et que cette phrase s’adressait plus à eux qu’aux petits Congolais.
Ce qui est certain, c’est que Tintin au Congo est un ouvrage très dangereux, à ne pas mettre entre les mains d’un public non averti.
Et maintenant, je m’en vais relire Les Malheurs de Sophie.
Voir aussi : Le Musée africain de Tervuren
Tintin acquitté - le 10 février 2012
Décembre 2023 : Tintin au Congo a dorénavant une nouvelle couverture, de laquelle le personnage africain a disparu. Voilà comment on résoud le problème du racisme : il suffit de faire disparaître les noirs !! https://www.rts.ch/info/culture/livres/14549171-tintin-au-congo-muni-dune-preface-contextuelle-et-dune-nouvelle-couverture.html
La revue Jeune Afrique trouve elle aussi que les éditions Moulinsart et Casterman invisibilisent les Africains en pensant déracialiser la bande dessinée : https://www.jeuneafrique.com/1513559/culture/tintin-au-congo-preface-et-revisite-une-fausse-bonne-idee/