jeudi 26 septembre 2024

Une visite guidée au CERN - le Conseil européen pour la Recherche nucléaire


Il est dorénavant possible d’organiser des visites guidées pour groupes au CERN. Il a fallu attendre bien longtemps avant que cela ne soit possible. Autrefois, il fallait connaître quelqu’un à l’intérieur de l’organisation, il fallait venir avec son propre minibus et attendre environ 6 mois avant qu’un créneau se libère. Ensuite, tout a été bloqué et stoppé, le temps qu’ils construisent leur tout nouveau Centre des Visiteurs, le Portail de la Science, conçu par Renzo Piano et inauguré en octobre 2023 : une exposition permanente, située dans deux cylindres qui enjambent la route, évoquant les tubes de l’accélérateur de particules. Tous les jours, des exposés et diverses activités sont proposés (voir visit.cern). On peut également participer à des visites guidées individuelles, mais qui sont à réserver le jour-même, sur place, en prenant le risque que tout soit complet. Un tel système est évidemment impossible à gérer pour de plus grands groupes. Les gens sont très enthousiastes et désireux de découvrir ce site mythique. Les visites sont prises d’assaut et le Centre des Visiteurs fourmille constamment de monde. Toutes les activités, ateliers, vidéos et visites proposés sont entièrement gratuits. Il s’agit sans doute d’un effort de relations publiques pour mieux se faire connaître du public, mais aussi pour satisfaire l’immense curiosité pour les activités extraordinaires déployées par le CERN. En vertu de l’article II de sa Convention*), « l'Organisation s'abstient de toute activité à fins militaires et les résultats de ses travaux expérimentaux et théoriques sont publiés ou de toute autre façon rendus généralement accessibles ». Toutes les données deviennent publiques au bout de trois ans. Le CERN ne fonctionne donc pas dans une finalité commerciale.

 

Le CERN a vu le jour au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, afin de recréer un centre d’excellence en Europe, après que de nombreux scientifiques et chercheurs ont dû s’exiler aux Etats-Unis. Il rassemble 24 États européens et collabore avec de nombreux États extra-européens. Les Etats-Unis, l’Inde ou le Pakistan, par exemple, ont le statut d’observateur. Entre le personnel permanent, les chercheurs en résidence ou les universitaires de passage, on compte en moyenne 10.000 personnes présentes par jour sur le site à Meyrin. Pour travailler au CERN, il faut toutefois être ressortissant d’un des Etats membres. Le budget annuel tourne autour de 1 milliard CHF. 


Plusieurs modèles d’accélérateurs de particules se sont succédé au cours de ces 70 dernières années. Le synchrocyclotron, qui date de 1957, est dorénavant mis à la retraite. Le synchrotron à protons (1959) lui a succédé, puis le super synchrotron à protons (SPS, 1976), l’accélérateur proton-antiproton (1983) et enfin le grand collisionneur électron-positon, le LEP (1988), qui a été stoppé en 2000, afin de permettre la construction du LHC, le grand collisionneur de hadrons (2008). Le LHC tourne H24 et n’est mis à l’arrêt que pour Noël et pendant deux semaines en hiver. 




L’excavation du tunnel du LEP était le plus gros chantier en Europe, avant le tunnel sous la Manche. Les particules tournent dans un circuit de 27 km, doté de milliers d’aimants supraconducteurs et de structures accélératrices, à une vitesse quasi équivalente à celle de la lumière : un proton fait 11 fois le circuit de 27 km en une seconde. A noter que la majeure partie de l’anneau que forme le LHC se trouve sur le territoire français, entre 60 et 110 m sous terre, bien que le siège du CERN soit en Suisse. Sur le parcours d’accélération, se trouvent des détecteurs portant des noms tels que CMS (Compact Muon Solenoid) ou encore ALICE (A Large Ion Collider Experiment), qui permettent d’observer les collisions des particules qui parcourent l’anneau en sens inverse, de sorte à provoquer des collisions - l’occasion d’entendre le mot « collimateur » au sens propre du terme. A noter que le LHC qui a succédé au LEP utilise le même tube de 27km de circonférence. L’observation et la détection des collisions produisent 40 terabytes/seconde de données, qui sont filtrées, pour ne garder finalement « que » 200 GB/seconde. 


Le CERN a le projet de construire un nouvel accélérateur, le FCC ou Futur Collisionneur Circulaire, d’une circonférence de 91 km et situé à 200 m sous terre, un projet dont le devis s’élève à 15 milliards CHF. Son but est de comprendre encore mieux les lois fondamentales de la physique. Les milieux écologistes y sont opposés, à cause du chantier immense qu’entraînera cette nouvelle construction et de son impact sur le climat. Toutefois, la Chine travaille sur le même projet et, s’il ne se fait pas en Europe, la recherche fondamentale partira à l’autre bout de la planète. Il convient alors de se demander ce qui doit primer : la recherche ou la protection de la nature ?  



Comme chacun le sait, le World Wide Web a été lancé au CERN en 1989. Son usage premier était de permettre l’échange de gros volumes de données et d’informations entre chercheurs. Même s’il ne s’agit pas directement du fruit des recherches faites au CERN, nul ne contestera que cette découverte a totalement bouleversé notre monde, en moins de 40 ans. Internet serait probablement né de toute façon, il aurait succédé au Minitel, si populaire en France entre 1980 et 2012. Le touchscreen a également été inventé au CERN. D’autres découvertes sont plus confidentielles, comme par exemple certaines applications médicales (thérapie à base de hadrons pour traiter le cancer ou encore l’installation MEDICIS à base de radioisotopes pour la thérapie et le diagnostic). Il vaut certainement la peine pour le CERN de mieux se faire connaître du public.


Le 29 septembre 2024, le CERN fêtera ses 70 ans, qui seront célébrés avec une journée Portes Ouvertes. 


Pour plus de détails techniques et une visite virtuelle, voir home.cern 


*) Convention pour l’Établissement d’une organisation européenne pour la recherche nucléaire (1953)




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